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Comment les constructeurs français ont déréglé la balance commerciale automobile

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Depuis une décennie, la balance commerciale du secteur automobile est négative. Non pas que les Français préfèrent les marques étrangères. Mais Renault et, dans une moindre mesure, PSA préfèrent produire les modèles à gros volumes dans des pays où la main d'oeuvre est moins chère.

L'industrie automobile française se porte -globalement- bien en France. Les constructeurs ne cessent de faire évoluer leurs modèles ou d'en présenter de nouveaux et leurs volumes de ventes explosent mois après mois, à l'image de Renault qui a battu de nouveaux records à l'issue du premier semestre 2018. Pour autant, depuis une dizaine d'années, Renault, Peugeot, Citroën, Alpine et DS ne contribuent plus vraiment à la bonne santé de l'économie française, la balance commerciale automobile étant déréglée. 

Selon des données du cabinet spécialisé IHS pour le quotidien Les Échos, chaque année, "la France importe entre 250.000 et 450.000 véhicules de plus qu'elle n'en exporte". En 2017, l'Hexagone a ainsi fait entrer 1,84 million de véhicules sur son territoire, tandis que 1,46 million de véhicules étaient exportés.

Cette tendance s'explique notamment par les stratégies industrielles mises en place par les constructeurs (fermetures de sites, réduction de la production et des effectifs) afin de traverser la crise automobile de 2008-2009, comme le rappelle ce dossier de la Documentation Française. 

Les véhicules les plus vendus en France sont fabriqués... à l'étranger

Marqués par cette période, les groupes Renault et PSA préfèrent depuis limiter leurs capacités industrielles en France et réserver leurs usines non pas aux véhicules réalisant le plus de volumes mais aux véhicules à forte valeur ajoutée comme les SUV, les modèles "premium" ou encore les utilitaires.

Exception faite de sa déclinaison sportive baptisée R.S., la Renault Clio (voiture la plus vendue en France) n'est plus produite dans l'Hexagone. La citadine peut provenir de Slovénie ou de Turquie. Toujours dans la gamme Renault, le Kadjar, SUV à succès de la marque au losange, est lui produit en Espagne, dans l'usine de Palencia. Un site qui produit aussi la Mégane et ses dérivés.

Chez Citroën, rares sont les véhicules "made in France". Depuis l'arrêt de la production de la berline C5, seule la citadine C3 est produite dans l'Hexagone au sein de l'usine de Poissy. Le futur vaisseau amiral de la marque aux chevrons, le SUV C5 Aircross devrait, lui aussi, être produit en France, sur le site historique de PSA situé à Rennes-La Jannais. 

"Il y a eu des transferts des petits véhicules vers l'Europe de l'Est. La Slovénie et la Turquie pour Renault. La République Tchèque et la Slovaquie pour PSA", relève également dans Les Échos, Denis Schemoul, analyste chez IHS. 

Depuis 2005, le groupe PSA produit son duo Peugeot 107/Citroën C1 puis Peugeot 108/Citroën C1 en coopération avec Toyota dans une usine située en République Tchèque. Allié à Daimler pour la fabrication de minicitadines, Renault produit depuis 2014 sa Twingo à Novo Mesto, en Slovénie, sur les mêmes chaînes que la Smart Forfour. 

L'exception Peugeot 

Parmi les constructeurs français, un seul a réellement fait le pari du "made in France". Il s'agit de Peugeot. La marque au Lion produit encore une grande partie de son catalogue dans ses usines françaises et notamment les 3008 et 5008, ses derniers modèles à succès. L'usine PSA de Sochaux, où ils sont fabriqués, ayant d'ailleurs du mal à répondre à la demande. 

Ce maintien de la production au sein de l'Hexagone fait partie de la stratégie de montée en gamme du constructeur. Ce dernier en a d'ailleurs fait un argument de vente puisqu'il appose le logo "Origine France Garantie" -un label privé créé par l'ex-ministre Yves Jégo- sur les modèles concernés et n'hésite pas à mentionner cette spécificité dans ses publicités. 

Antonin Moriscot Journaliste BFMTV