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Pénurie de carburant: pourquoi la situation reste tendue dans certaines régions?

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Alors que la situation s'améliore au niveau national (21,9% des stations-essence en rupture ce mercredi), certaines régions souffrent encore de tensions en raison d'approvisionnements plus complexes.

Une nouvelle preuve que les zones géographiques ne sont pas toutes logées à la même enseigne face à la pénurie de carburants. Au début du mouvement social, les Hauts-de-France, le Grand-Est puis l'Île-de-France apparaissaient comme les régions françaises les plus exposées avec environ une station-essence sur deux en rupture d'au moins un carburant au pic de tension.

Aujourd'hui, la situation témoigne d'une nette amélioration depuis quelques jours avec moins de 21,9% des stations-service en tension ce mercredi. Mais ce sont désormais d'autres régions françaises qui se trouvent dans une situation particulièrement tendue. C'est notamment le cas de la Bourgogne-Franche-Comté, de l'Occitanie ou encore l'Auvergne-Rhône-Alpes, comme le montre la carte ci-dessous.

Une forte dépendance à l'acheminement par voie ferroviaire

"Une fois que les salariés des raffineries recommencent à travailler, la difficulté est d'aller alimenter les 200 dépôts de France", rappelle Francis Pousse, président de la branche station-service et énergies nouvelles du syndicat professionel Mobilians. Or, toutes les régions ne sont pas ravitaillées via les mêmes moyens de transports. Avec des taux de tension respectifs d'environ 37 et près de 24%, la Bourgogne-Franche-Comté et l'Occitanie figurent parmi les rares régions françaises ayant particulièrement recours à l'approvisionnement par voie ferroviaire.

"Or, certains chargements de train qui se font dans les raffineries ont été bloqués dernièrement et n'ont que partiellement repris de manière ciblée", explique Olivier Gantois.

Le président de l'Union française des industries pétrolières (UFIP) évoque également l'afflux inhabituel de clients dans les stations-essence, pris de peur de manquer de carburant, ce qui n'a pas arrangé la situation. Et le problème logistique ne s'arrête pas là puisque les trains circulent également sur certains jours spécifiques, là où l'approvisionnement par pipeline peut quasiment s'opérer sans interruption.

Des relais moins efficaces

Des solutions de contournement existent comme les camions mais ce mode de transport souffrent aussi de problématiques, d'abord en termes de quantité. "Un train peut transporter 1000 à 1500 tonnes de carburant tandis qu'un camion est limité à environ 35 tonnes", indique Olivier Gantois. Les camions sont d'autant plus limités dans leur capacité de ravitaillement qu'ils sont amenés à parcourir des distances plus longues pour approvisionner les stations-essence de ces régions.

"En temps normal, un camion livre 3 à 4 stations-service par jour mais aujourd'hui c'est plutôt une par jour car il a beaucoup plus de trajet à effectuer", souligne Francis Pousse qui mentionne aussi le phénomène d'engorgement des dépôts de carburant.

Le président de la branche station-service et énergies nouvelles du syndicat professionel Mobilians réitère les prévisions qu'il avait formulées au micro de BFMTV la semaine dernière: "Il faudra attendre entre 15 et 20 jours avant un véritable retour à la normale, c'est-à-dire une situation où toutes les stations-essence sont approvisionnées avec leurs stocks moyens habituels."

Des leviers différents en fonction des régions

Mais alors comment expliquer l'amélioration sensible de la situation dans les régions qui étaient les plus touchées au début du mois d'octobre? Le taux de tension avait atteint 55% dans les Hauts-de-France mais n'est plus ce mercredi que de 16,6%.

Dans le Grand Est, 22,6% des stations-essence témoignent d'une rupture sur au moins un carburant contre 31% lundi. Même si un tiers des sites franciliens sont actuellement touchés, la région parisienne avait encore un taux supérieur à 40% en début de semaine. Pour chacune de ces zones géographiques, ce sont des facteurs différents qui ont conduit à un soulagement de la situation aux pompes à essence.

Dans le nord du pays, c'est la réquisition du dépôt de Mardyck, près de Dunkerque, qui a été décisive. L'Île-de-France a, quant à elle, bénéficié du redémarrage de la raffinerie normande d'Esso-ExxonMobil mais aussi du retour de l'approvisionnement par pipeline depuis les Hauts-de-France. A la frontière allemande, la source du problème était davantage naturelle. "Les eaux du Rhin sont capricieuses et peuvent empêcher les barges de circuler si leur niveau est trop élevé ou trop bas, précise Olivier Gantois. En réalité, il y avait là-bas un déficit d'approvisionnement avant même le début du mouvement social en septembre."

Timothée Talbi