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Des prévisions drastiquement changées: l'AIE envisage un déclin du pétrole et du gaz pas avant 2050, soit 20 ans plus tard que prévu

Un puits de pétrole en fonctionnement à Taft, dans le comté de Kern, en Californie, le 21 septembre 2023.

Un puits de pétrole en fonctionnement à Taft, dans le comté de Kern, en Californie, le 21 septembre 2023. - Frederic J. BROWN / AFP

L'Agence internationale de l'énergie est sur le point de modifier complètement ses prévisions selon Bloomberg. Le pic de demande du pétrole et du gaz n'est plus attendu à la fin de la décennie mais à l'horizon 2050.

La fin de l'ère des énergies fossiles n'est peut-être pas pour tout de suite. Pourtant, le pic de consommation du pétrole et du gaz est jusqu'ici prévu à la fin de la décennie par l'Agence internationale de l'énergie (AIE), dont les analyses servent de référence.

Dans son dernier rapport, l'institution s'attend notamment à une décrue de la demande de pétrole aux États-Unis à partir de 2026, et en Chine à partir de 2028, signant un déclin irrémédiable au niveau mondial.

Or, l'AIE est sur le point de modifier ses prévisions selon Bloomberg, qui a eu accès à une version préliminaire du prochain rapport et a interrogé une demi-douzaine de personnes l'ayant consulté.

Concrètement, l'agence s'apprête à ajouter à son étude un nouveau type de scénario basé sur les politiques actuellement menées, alors que ses évaluations des dernières années intégraient aussi l'effet des promesses politiques.

Selon cette nouvelle mouture, encore susceptible d'évoluer, "la consommation de pétrole et de gaz naturel augmentera jusqu'en 2050", si les politiques actuelles se maintiennent. À cette date, l'AIE anticipe que le monde consommera 114 millions de barils de pétrole par jour (Mb/j), contre 104 millions Mb/j actuellement. Cette évaluation se rapproche de l'évaluation de l'organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), qui s'attend à une consommation de 123 Mb/j en 2050.

La demande se situerait ensuite sur une sorte de plateau, sans chuter rapidement comme certains scenarios l'ont prévu.

La hausse serait tirée par l'aviation, le transport maritime et la fabrication de matières premieres pétrochimiques, alors que le manque de soutien politique aura eu pour effet de faire stagner les ventes de voitures électriques dans certains pays comme les États-Unis.

"Apport énergétique supplémentaire"

Une telle trajectoire ferait définitivement dévier la planète de l'accord de Paris, qui prévoyait des objectifs devant limiter la hausse des températures à 1,5°C par rapport à l'ère préindustrielle (+1,1°C actuellement). Le monde se dirige plutôt vers un réchauffement de +3°C .

La part des hydrocarbures dans le mix énergétique mondial diminue peu malgré la montée en puissance des énergies renouvelables dans la production d'électricité. Pour l'heure, l'électricité ne représente que 21% de la consommation d'énergie dans le monde, même si cette part augmente.

En fait, nous assistons à un "apport énergétique supplémentaire" et non pas "à une transition énergétique", observent des dirigeants de Standard & Poor's et de la banque Lazard dans la revue Foreign Affairs.

"La transition énergétique n'était pas censée se dérouler ainsi. La réalité du système énergétique mondial a déjoué ces attentes, montrant clairement que la transition sera bien plus difficile, coûteuse et complexe que prévu initialement", poursuivent-ils.

Parallèlement, la production mondiale de pétrole a atteint en août un niveau record, selon le dernier rapport mensuel de l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Ces hausses de production tendent à faire baisser les prix de l'or noir, compliquant d'autant plus le virage.

Pierre Lann