Débat d'entre-deux-tours: Macron a-t-il vraiment suspendu le projet d'éoliennes en face du Touquet?

"Ça, c'est du complotisme". Emmanuel Macron a vivement critiqué les accusations de Marine Le Pen sur la suspension d'un parc éolien au large du Touquet en 2017.
Interrogée sur sa politique énergétique, la candidate du Rassemblement national a rappelé sa volonté de poser un moratoire sur les éoliennes. Elle en a surtout profité pour accuser Emmanuel Macron d'être intervenu dans la décision de suspendre le projet de parc éolien dans la zone de Bassure de Baas, qui s'étend Boulogne-sur-Mer à Berck, en passant par le Touquet, où Brigitte Macron possède une maison.
"Vous voulez en mettre partout, sur toutes les côtes, sauf en face du Touquet", a-t-elle attaqué. "C'est la réalité. Tous ont été actés sauf en face du Touquet."
"Il n'y en a aucune (éolienne) qui a été actée, la planification n'a pas commencé, elle est en concertation", a-t-il répondu. "Vous dites n'importe quoi en étant insidieuse".
Un projet effectivement suspendu
Sur Twitter, le compte officiel de Marine Le Pen ainsi que plusieurs de ses lieutenants ont d'ailleurs affiché un article de France3 Hauts-de-France, confirmant la suspension du parc, en juillet 2017.
Le projet de parc éolien avait été annoncé par l'ancienne ministre de l’Environnement Ségolène Royal, en février 2017 (sous la présidence de François Hollande). Il s'agissait alors de "consultations", qui avaient créé la surprise et la colère des élus locaux.
En juillet, son successeur sous Emmanuel Macron, Nicolas Hulot, avait finalement annoncé la suspension du projet, une décision saluée alors par Thibaut Guilluy, opposant LaREM (dont la suppléante lors des élections législatives était Tiphaine Auzière, la belle-fille d'Emmanuel Macron) au député du Pas-de-Calais (LR) Didier Fasquelle.
Faut-il voir un lien entre cette suspension – toujours d'actualité - et la maison touquettoise du président de la République et de son épouse? La décision a été prise par le préfet du Nord de l'époque, Michel Lalande, en poste depuis 2016, et par le préfet maritime de la Manche et de la mer du nord, Pascal Ausseur, en poste depuis 2015.
"Le précédent gouvernement nous avait confié, par courrier du 15 mars 2017, la mission d'organiser la consultation des parties prenantes afin de déterminer un périmètre précis pouvant accueillir un parc éolien en mer posé sur la zone dite de Bassure de Baas, au large de la Côte d'Opale et de la Baie de Somme. (…) Suite à cette consultation, nous avons rendu nos conclusions au ministère le 3 mai 2017, en indiquant que les conditions favorables au lancement d'un appel d'offres sur la zone de Bassure de Baas n'étaient pas réunies à ce stade", écrivent les deux responsables.
Actions en justice
Leurs conclusions ont donc été transmises au ministère avant le second tour de l'élection présidentielle, le 7 mai 2017.
Auparavant, Daniel Fasquelle (devenu depuis 2020 maire du Touquet) et plusieurs maires du littoral étaient montés au créneau contre le projet, promettant des actions en justice.
Interrogé à l'époque par le site Actu-Environnement, le chargé de mission à France énergie éolienne (FEE) Matthieu Monnier avait reconnu une "non planification et l'absence de vision à long terme" sur ce projet. "C'est ce qui a motivé selon nous la décision de l'État, il convient de ne pas se précipiter sur les appels d'offres", estimait-il.