Crise ukrainienne: quelle alternative au gaz russe pour l'Europe?
En déplacement à Moscou ce lundi, Emmanuel Macron rencontre Vladimir Poutine pour tenter de désamorcer la crise ukrainienne. Pendant ce temps, une importante réunion est prévue à Washington entre Américains et Européens sur l'approvisionnement en gaz de l'Europe. De nombreux pays craignent que la Russie, qui assure aujourd'hui 40% de l'approvisionnement du Vieux Continent, ne réduise ses livraisons si un conflit éclatait avec l'Ukraine. Les Etats-Unis et le gaz naturel liquéfié (GNL) pourraient faire partie de la solution à une fermeture du robinet russe.
Condensé à l'état liquide, le GNL peut arriver par bateau du monde entier: régazéifié à l'arrivée dans des terminaux méthaniers, il peut être redistribué sous forme gazeuse via le réseau de gazoducs européens. Les Etats-Unis sont déjà le plus grand fournisseur de GNL à l'Union européenne, mais en prévision de chocs d'approvisionnement qui pourraient résulter notamment d'une invasion russe de l'Ukraine, Washington est en train d'intensifier sa collaboration avec les différents gouvernements européens et les opérateurs de marché afin de fournir des volumes supplémentaires.
Ce travail va se poursuivre lors de la réunion de ce lundi avec la Commission européenne. Il s'agit de rassurer l'Europe car les inquiétudes sont grandes en cas de guerre en Ukraine – les Etats-Unis menacent la Russie de sanctions et ont déjà affirmé que le gazoduc controversé Nord Stream 2 entre la Russie et l'Allemagne, achevé mais pas encore opérationnel, ne serait pas activé en cas d'attaque. La crainte est que Moscou, en représailles, ne réduise de manière drastique les fournitures d'hydrocarbures dont plusieurs pays européens dépendent de manière vitale.
"Ce n'est pas un plan B"
L'objectif de cette réunion à Washington est de peaufiner un "plan B" et de trouver les meilleures solutions pour stocker en toute sécurité les fournitures additionnelles de gaz aux Européens.
Mais "ce n'est pas un plan B, c'est plutôt un plan C, E ou F, parce que dans l'état actuel des choses, remplacer l'intégralité des importations russes de gaz par d'autres sources, c'est très problématique", souligne Jean-Pierre Favennec, professeur à l'IFP School, sur BFM Business. Outre le gaz russe, l'Europe importe "à peu près 20% [de son gaz] depuis la Norvège, le reste vient de différents pays comme le Qatar ou le Nigeria, mais ça reste très limité", précise-t-il.
Et même si les Etats-Unis développent actuellement beaucoup de production de GNL, une partie des pays européens, en particulier la France, restent réticents aux importations de gaz américain, car il est issu en partie du gaz de schiste.
Par ailleurs, les Etats-Unis exportent leur gaz "un peu partout dans le monde", ce qui fait que "les quantités qui peuvent venir en Europe restent relativement limitées", poursuit le spécialiste de l'énergie, pour qui l'Europe "aurait beaucoup de souci" si "les approvisionnements russes venaient à disparaître".
Mais une telle éventualité n'est pas encore à l'ordre du jour, assure-t-il, et il est peu probable que Moscou coupe le robinet. Pour Jean-Pierre Favennec, les Russes "se tireraient quand même une balle dans le pied, parce qu'il y a encore beaucoup d'oléoducs qui viennent en Europe et vendre du gaz est extrêmement important pour eux".