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Victoire de Donald Trump: quels risques pour l'Europe si les États-Unis décidaient de sortir de l'Otan?

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La victoire de Donald Trump inquiète l'Europe, mais réjouit le Kremlin. Depuis des années, le 47e président américain ne cache pas son hostilité pour l'Alliance transatlantique et son admiration pour son homologue russe.

Ce matin, dès les premiers signes de la victoire de Donald Trump, le chef de l'Otan et le président ukrainien ont été parmi les premiers à adresser des félicitations à l'alors futur 47e président américain. Cet empressement n'a rien d'anodin et il ne s'agit pas pour eux de se réjouir.

Dans le même temps, le ministre allemand de la Défense Boris Pistorius rencontrera son homologue français Sébastien Lecornu ce mercredi soir à Paris, selon l'AFP. Un signe qui ne trompe pas.

La victoire de Donald Trump dans la course à la Maison Blanche désormais acquise, cette élection aura en effet de lourdes conséquences pour les Européens.

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Depuis des années, même lorsqu'il était président, le candidat républicain mettait la pression sur les pays européens membre de l'Otan. Il les accusait de ne pas assez investir dans la défense.

"Non, je ne vous protégerais pas"

Trump a même fait de l'Otan un argument de campagne. Début 2024, lors d'un meeting, il rapportait une conversation avec le dirigeant d’un pays membre de l’Alliance.

"Si on ne paie pas et qu’on est attaqués par la Russie, est-ce que vous nous protégerez?", lui aurait-il demandé. La réponse de Donald Trump a été violente.

"Non, je ne vous protégerais pas. En fait, je les encouragerais à vous faire ce qu’ils veulent. Vous devez payer vos dettes", aurait-il lancé avant de préciser qu'il s'agissait d'une "manière de négocier".

Une allusion claire à la contribution des États-Unis au budget de l'Otan. C'est la plus haute des 32 pays avec une part de 16,34% en 2024 devant l'Allemagne (15,8%), le Royaume-Uni (10,96%)) ou la France (10,19%). Sans cette participation, la défense de l'Europe serait à redéfinir en profondeur.

Une menace pour l'Otan

Depuis plusieurs jours, la tendance qui dévoilait une possible victoire de Donald Trump à la présidence des États-Unis alertait les pays membres. Anticipant l'arrivée du candidat Républicain, le Secrétaire général de l'Otan, Mark Rutte, a pris la parole lundi pour rassurer les Européens.

"Quel que soit le vainqueur de ces élections, nous travaillerons avec Kamala Harris, nous travaillerons avec Donald Trump, et nous veillerons à ce que l'alliance demeure unie", a-t-il promis lors d'une conférence de presse à Berlin en présence du chancelier allemand Olaf Scholz à Berlin.

Mark Rutte a même assuré que les Américains savent que "si Poutine réussit en Ukraine, la Russie se trouvera sur notre flanc oriental et représentera une menace directe pour le territoire de l'Otan".

Est-il crédible que les États-Unis sortent de l'Otan? C'est clairement dans l'intérêt de Vladimir Poutine qui espère qu'avance Trump, l'aide américaine à l'Ukraine se réduise pour conduire Volodymyr Zelensky à négocier puis à quitter le pouvoir après la défaite. Les relations de Donald Trump et du président russe sont connues et les deux hommes ne cachent une admiration mutuelle.

F-35: une épée de Damoclès pour l'Europe

Cette relation doublée d'une hostilité à l’égard de l’Otan, est une véritable menace pour l’Europe déclarait au Washington Post Tom Donilon, conseiller à la sécurité nationale des États-Unis sous l'administration Obama entre 2010 et 2013.

Cette menace est d'autant plus forte que depuis des années, de nombreux pays européens se sont équipés de F-35, l'avion de chasse américain, au détriment des appareils européens. Cet appareil équipe, ou va équiper, les forces aériennes au Royaume-Uni, en Italie, en Belgique, en Pologne, aux Pays-Bas, en Norvège, en Suisse, en Finlande et en Allemagne.

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Lors de la signature du contrat allemand pour 35 appareils, Olaf Scholz justifiait ce choix par la possibilité de disposer de la bombe atomique américaine B61-12, sur laquelle repose la dissuasion de l'Otan.

"Tant que des pays comme la Russie possèderont des armes nucléaires dans leur potentiel de menace, l’Otan aura besoin d’un potentiel de dissuasion crédible", déclarait en 2022 le chancelier fédéral au lendemain de l'invasion de l'Ukraine par la Russie.

Cet espoir risque de s'éteindre. L'utilisation du F-35 dans un conflit, même conventionnel, reste soumise à l'autorisation de Washington. Que fera Trump si les ambitions de Poutine allaient au-delà de l'Ukraine?

La dépendance de l'Europe aux États-Unis pourrait aller plus loin selon Thomas Shumacher, expert des questions de défense. Dans un article intitulé "F-35 & Big Data: épée de Damoclès pour la France et l’Europe?" et publié dans la Revue de la Défense nationale, il pointe le réseau de communication sous contrôle américain qui lie l'ensemble des avions des forces de l'Otan, non seulement les F-35, mais aussi les Rafale ou les Eurofighter.

Si les États-Unis quittait l'Otan, un effet domino se produirait sans que personne ne sache pour l'instant estimer les conséquences à court, moyen ou long terme.

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco