Election américaine: que va devenir l’aide du pays à l’Ukraine après l'élection de Donald Trump?

Depuis l'invasion russe de l'Ukraine, les États-Unis se sont clairement positionnés pour Kiev et contre Moscou. Quelle sera la position de Washington après la victoire de Donald Trump?
La paix en Ukraine, selon Trump
Le 47e Président des Etats-Unis se présente comme celui qui pourrait ramener la paix. Il ne cesse de rappeler qu'à l'inverse de ses prédécesseurs à la Maison Blanche, il est le seul président qui n'a pas conduit l'Amérique à la guerre. En avril dernier, il se disait capable de négocier un accord de paix entre la Russie et l'Ukraine en 24 heures. Selon des sources du Washington Post, l'idée de Trump est de faire pression sur l'Ukraine pour qu'elle cède une partie de son territoire, comme le demande le président russe.
Entre Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky, l'ancien président américain ne cesse de ménager la chèvre et le chou. Il n'a jamais caché son admiration pour le président russe allant jusqu'à ne pas prendre position sur la mort d'Alexeï Navalny, ni évoquer la libération d'Evan Gershkovich, journaliste du Wall Street Journal détenu en Russie sans motif.
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Prudent, le président Zelensky dit qu'il "n'a pas entendu" le candidat républicain dire qu'il ne soutiendrait pas son pays.
Si Trump cherche à rassurer le président ukrainien avec un plan de paix qu'il n'a jamais officiellement détaillé, il reste très ambigu sur l'Otan et ne cache pas son opposition à l'adhésion de Kiev.
"La relation inexplicable et admirative de l’ancien président Trump avec Poutine, ainsi que son hostilité sans précédent à l’égard de l’Otan, ne peuvent donner à l’Europe ou à l’Ukraine aucune confiance dans ses relations avec la Russie", déclarait au Washington Post Tom Donilon, conseiller à la sécurité nationale des États-Unis sous l'administration Obama entre 2010 et 2013. Cet expert en géopolitique est également président du Blackrock Investment Institute.
"Sa position représente un danger clair et présent pour la sécurité des États-Unis et de l’Europe", conclut Tom Donilon.
Dans le tableau de bord des risques géopolitiques Blackrock qui liste les dix principaux risques mondiaux, il affirme que la guerre en Ukraine "est le conflit militaire le plus important et le plus dangereux en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale". Pour Tom Donilon, ce n'est rien d'autre qu'une guerre entre l'Otan et la Russie.
Sur ce dossier de l'aide à l'Ukraine, les positions de Kamala Harris et de Donald Trump n'étaient pourtant pas aussi tranchées qu'on pourrait le penser lors de la campagne.
L'essentiel pour les deux candidats était de rassurer les Américains sur un engagement des États-Unis qui a déjà coûté cher et pourrait finir, dans le pire des cas, par menacer la vie de soldats américains. L'équation est d'autant plus délicate qu'il s'agit de défendre, via l'Otan, des alliés contre la Russie -encore considérée comme l'ennemi de toujours-, sans pour autant entrer dans une confrontation directe.
Poursuivre la ligne de Joe Biden
De son côté, Kamala Harris disait en effet vouloir poursuivre le soutien à l'Ukraine comme l'a fait le président Biden.
Elle promettait de rester "fermement aux côtés de l'Ukraine" affirmant qu'elle ne fera pas "ami-ami" avec "les dictateurs" en visant Vladimir Poutine, mais aussi Kim Jong-Un ou les mollahs de la république islamique d'Iran.
Une manière de rappeler que l'Iran fournit des armes à la Russie et, pour la Corée du Nord, des missiles et depuis peu plusieurs milliers de militaires venus se battre contre l'armée ukrainienne.
Depuis qu'elle a remplacé Joe Biden dans la course à la Maison Blanche, Kamala Harris avait multiplié les annonces d'aide à l'Ukraine. En juin, lors du Sommet pour la paix en Ukraine qui s'est tenu en Suisse, elle annonçait une 1,5 milliard de dollars pour le secteur énergétique et l’aide humanitaire.
En septembre, lors de la visite à Washington du président ukrainien, c'est encore elle qui a annoncé une nouvelle aide militaire de 8 milliards de dollars et l'envoi de munitions de longue portée.
À cette occasion, Kamala Harris a d'ailleurs affirmé au président Zelensky que son "soutien au peuple ukrainien est inébranlable".
Sans citer Donald Trump mais en le visant implicitement, elle estimait que le plan de paix qui consisterait à convaincre l'Ukraine de renoncer à ses territoires, comme le réclame Poutine, "n'est pas une proposition de paix".
"Ce sont des propositions de capitulation, ce qui est dangereux et irresponsable", a-t-elle ajouté.
Malgré ce soutien, Kamala Harris restait vague sur la poursuite de l'aide militaire à l'Ukraine.
Ne pas fracturer les électeurs
Le flou entretenu par les deux candidats visait à ne pas soulever un sujet qui risquait de créer une fracture parmi les électeurs. D'autant que les États-Unis doivent depuis un an soutenir Israël militairement et financièrement tout en se préparant à un conflit en Indo-Pacifique, entre la Chine et Taïwan.
Cette situation laisse les Ukrainiens dans la crainte de voir se réduire l'aide militaire. Depuis le début du conflit, Washington a été en tête des 50 pays alliés ou partenaires de l'Ukraine, comme le rappelle un rapport un rapport du Pentagone publié le 21 octobre 2024.
"Nous avons fourni plus de 64,1 milliards de dollars d’aide militaire depuis que la Russie a lancé son invasion à grande échelle (...) le 24 février 2022", indique le rapport du Pentagone.
Entre 2014 (invasion de la Crimée) et 2022, l'aide militaire a atteint 66,9 milliards de dollars. À ce montant, il faut aussi ajouter 31,7 milliards de dollars de matériels pris sur les stocks du Department of Defense (DoD), soit un total de 98,6 milliards de dollars. Un montant impossible à compenser par les Européens. Des Européens qui vont devoir prendre désormais leur destin en main.
