BFM Business
Défense

Caméra, grenades lacrymogènes voire une mitrailleuse: c'est quoi le Centaure, ce blindé à 740.000 euros pièce que la gendarmerie va massivement déployer ce jeudi

Les Centaures, blindés de la gendarmerie, pour leur premier défilé du 14 juillet, à Paris en 2025.

Les Centaures, blindés de la gendarmerie, pour leur premier défilé du 14 juillet, à Paris en 2025. - BFMTV

Ce véhicule blindé de 14,5 tonnes est un équipement de pointe de la gendarmerie, qui a en a commandé 90, pour près de 70 millions d'euros. La Cour des comptes a toutefois fait part de "doutes" sur son utilité.

Les autorités s'apprêtent à déployer un dispositif de sécurité jamais-vu depuis les manifestations des Gilets jaunes de 2019 pour la journée de mobilisation sociale de ce jeudi 19 septembre.

24 Centaures, des véhicules blindés de la gendarmerie, et 10 engins lanceurs d'eau seront mobilisés, selon les informations de BFMTV, alors que les autorités prévoient la présence de manifestants radicaux en marge des 250 rassemblements déclarés dans le pays. Au total, 800.000 manifestants sont attendus.

Les Centaures ont déjà été déployés par les forces de sécurité lors des émeutes de l'été 2023 qui ont suivi la mort de Nahel Merzouk, tué lors d'une intervention de police à Nanterre, et au cours des manifestations d'agriculteurs de l'hiver 2024.

Fabriqué en Alsace par Soframe, le Centaure est un 4X4 de 14,5 tonnes, entièrement blindé, qui a remplacé à partir de 2022 le VBRG (Véhicules Blindés à Roues de la Gendarmerie), en dotation dans la gendarmerie depuis les années 1970.

Le véhicule "a été pensé et conçu comme un véritable couteau suisse", pour intervenir dans des situations multiples (maintien de l'ordre, catastrophes naturelles, attentats, opérations extérieures...), précise la gendarmerie dans un communiqué.

Le Centaure est équipé d'une caméra longue distance, dotée d'une vision thermique pour fonctionner la nuit, et un dispositif téléopéré lui permet de tirer des grenades lacrymogènes tout en protégeant ses occupants.

"En cas de menaces plus graves, comme une attaque terroriste, qui impliqueraient le recours à la force armée, le Centaure peut être équipé d’une mitrailleuse 7,62 mm téléopérée", ajoute la gendarmerie.

La gendarmerie assurait que cette mitrailleuse ne serait installée que "si [elle devait] avancer sous le feu, mais pas lors de manifestations, même violentes", dans un article publié par BFM Business en 2023.

La Cour des comptes a émis des doutes sur son usage

90 engins ont été commandés dans le cadre d'un programme lancé en 2022, financé par le plan de relance, pour un montant de 67 millions d'euros, soit plus de 740.000 euros pièce (sans la maintenance). Un tiers d'entre eux se trouvent à Versailles-Satory, près de Paris, un tiers sont répartis en province, et le dernier tiers équipe la gendarmerie dans les outre-mer, selon une communication officielle.

Dans un rapport publié en 2024, la Cour des comptes estimait que "de forts doutes entourent l'adéquation de la flotte de Centaures à l'usage réel qui en sera fait". Concrètement, ses membres estimaient que la décision d'acheter ces blindés s'était faite "dans l'urgence du plan de relance", avec une "spécification rapide et incomplète".

Ils s'étonnaient de plus du "dimensionnement de la flotte, pensé pour remplacer en 'un pour un' la flotte de blindées actuelle de la gendarmerie, alors même que le nouveau véhicule est bien plus polyvalent et puissant que son prédécesseur".

De manière générale, la Cour des comptes notait que "les forces mobiles se heurtent aujourd’hui au dilemme consistant à devoir réduire la dangerosité de leurs armements tout en continuant à maintenir les foules à distance". Cela entraîne "le recours à des matériels plus coûteux dont certains doivent être acquis en urgence", sans réflexion globale.

Pierre Lann