Coût du travail: une étude pointe la "surfiscalisation" de l'emploi qualifié en France

Peut-on parler de "surfiscalisation" des hauts salaires en France? C'est en tout cas ce qui ressort d'une étude Rexecode, (think tank réputé proche du patronat) publiée ce lundi et commandée par la branche professionnelle Syntec du numérique, de l'ingénierie, du conseil, de l'événementiel et de la formation professionnelle. Les auteurs effectuent une comparaison avec plusieurs autres pays européens du coût du travail et du revenu net disponible.
"La France se distingue des autres pays en surfiscalisant le travail pour les rémunérations supérieures à environ 1,4 SMIC, ce qui correspond généralement à du travail qualifié", explique Olivier Redoulès, directeur des études chez Rexecode.
Les prélèvements sur le travail - cotisations, taxes, impôts et en déduction aides subventions - sont ainsi 6 points supérieurs en France pour les salaires compris entre 1,4 et 2,5 SMIC puis 11 points entre 2,5 et 3,5 SMIC et 15 points au-delà de 4 SMIC. A titre de comparaison, le coût du travail sur les salaires compris entre 1 et 1,4 smic est inférieur en France.
Des conséquences sur l'offre et la demande
"La surfiscalisation du travail qualifié pénalise l’économie française parce qu'elle en augmente le coût et en réduit la quantité", estime Olivier Redoulès.
Avec un revenu disponible moins important que chez nos voisins européen, une partie de la jeunesse française serait découragée à s'engager dans les formations les plus exigeantes et qualifiantes, "contribuant à limiter l’offre de travail qualifié", pointe l'étude.
D'un autre côté, cette "surfiscalité" induirait des surcoûts pour les entreprises, réduisant leurs compétitivités par rapport à leurs concurrentes européennes. Pour les sociétés représentées par Syntec, cela représenterait un coût supplémentaire de près 8 milliards d'euros par an, soit 12% de la masse salariale globale.
Ainsi la fédération propose d’ajuster le coût du travail qualifié pour qu’il soit comparable à celui des pays voisins de la France. Cela permettrait, selon elle, d’augmenter le PIB de 0,4 point et de générer près de 100 000 emplois à long terme. Le surcoût pour les finances publiques "pourrait être financé en reportant le coût de la protection sociale sur des assiettes fiscales moins distorsives que le travail", avance Olivier Redoulès.
Inquiétude
La publication de cette étude n'intervient pas au hasard. Le nouveau projet de loi de finances de la Sécurité sociale 2025 devrait être dévoilé dans les prochains jours par le gouvernement. L'examen du texte durant l'automne avait provoqué l'inquiétude du milieu patronal.
La mouture initiale dévoilée par le gouvernement Barnier désirait remettre en cause le système d'allègements des charges d'entreprises avec une sortie du dispositif pour les salaires supérieurs à 2,5 SMIC. 4 milliards d'euros d'économies étaient attendues. En commission mixte paritaire, les parlementaires s'étaient finalement entendus pour limiter la baisse des exonérations sociales dont bénéficient les entreprises. De quoi dégager seulement 1,6 milliard d'euros de gain pour la Sécurité sociale.