Un millier de bovins abattus, 49 élevages dépeuplés, 100.000 vaccinations: une course contre la montre s'est engagée contre la dermatose nodulaire contagieuse

Des vaches se reposent dans un champ à La Clusaz, en Haute-Savoie, le 21 août 2013 (photo d'illustration). - Jean-Pierre Clatot - AFP
La dermatose nodulaire contagieuse continue de progresser dans les montagnes savoyardes, ayant déjà entraîné l'abattage d'un millier d'animaux dans les Alpes. Transmise par des piqûres d'insectes, cette maladie virale animale s'attaque aux vaches, buffles et zébus. Un cas de dermatose nodulaire a été détecté pour la première fois en France à la fin du mois de juin, dans un élevage de Savoie, avant qu'elle ne se propage rapidement à d'autres élevages de la région.
À date du 30 juillet 2025, 51 foyers ont été détectés dans une trentaine d'élevages sur le territoire français, dont 27 foyers en Haute-Savoie et 24 foyers dans en Savoie, selon le ministère de l'Agriculture. Pour contrer son avancée rapide dans l'Hexagone, alors que la période estivale est particulièrement favorable aux insectes piqueurs (mouches, taons) qui transmettent la maladie, l'État avait ordonné l'abattage systématique de l'entièreté d'un troupeau au sein duquel a été identifié un animal infecté.
À ce jour, "49 élevages ont été dépeuplés" et le dépeuplement est "en cours" dans deux élevages, a précisé le ministère de l'Agriculture lors d'un point presse, précisant qu'environ "un millier de bovins" ont été abattus depuis un mois.
Vaccination obligatoire
Une large campagne de vaccination, dont le coût est pris en charge par l'État, a été rapidement lancée à la mi-juillet grâce à des doses commandées auprès de l'Union européenne. Cette même campagne de vaccination, qui s'appuie sur le vaccin d'un laboratoire sud-africain, est circonscrite à une "zone réglementée" qui recouvre les deux départements savoyards et déborde sur l'Ain et l'Isère. Aucune vache n'y échappe: la vaccination a été rendue obligatoire à l'intérieur de la zone réglementée.
Sur 310.000 bovins, "à peu près un tiers" ont été vaccinés en deux semaines, précise le ministère de l'Agriculture, qui assure que les doses commandées par l'État seront "suffisantes" pour couvrir toute la zone réglementée.
Outre la vaccination et l'abattage préventif, d'autres mesures de biosécurité (désinfection, désinsectisation, nettoyage, etc.) et une interdiction des mouvements de bovins au sein de la zone réglementée ont été ajoutées à la liste des précautions d'usage. Pour le moment, c'est une course contre-la-montre qui s'engage dans les cols alpins pour stopper la progression de l'épizootie, contre laquelle aucun traitement n'existe à l'heure actuelle pour soigner les animaux malades.
Un taux de mortalité "d'environ 10%" est constaté dans les élevages contaminés, tandis que les survivants peuvent présenter des "séquelles graves", telles qu'un amaigrissement, un avortement ou un arrêt de la production de lait, selon le ministère de l'Agriculture. Or, des animaux qui semblent en bonne santé peuvent être porteurs du virus, en raison de la longue période d'incubation (28 jours) ou d'une absence de symptômes, d'où le choix de l'abattage préventif pour endiguer sa transmission.
Désarroi des éleveurs
Mais ces mesures de "dépeuplement" agitent le monde agricole. Dans les territoires concernés, des éleveurs réfractaires se sont mobilisés au début de l'épizootie pour bloquer l'accès à certaines exploitations et empêcher l'abattage des animaux, sans infléchir la stratégie de l'État et des autorités sanitaires. Un éleveur savoyard, soutenu par la Coordination rurale qui dénonce la "brutalité institutionnelle" de l'abattage systématique, a récemment vu son recours rejeté par le Conseil d'État.
Le dépeuplement d'un élevage donne lieu à un vide sanitaire d'une vingtaine de jours: si le repeuplement est théorique possible à l'issue de cette période minimale, il reste toutefois difficile à mettre en œuvre tant que la zone réglementée limite les mouvements de bovins. Pour calmer les inquiétudes, le ministère de l'Agriculture a notamment promis d'allonger la "période d'improductivité" incluse dans le dispositif d'indemnisation pour prendre en compte l'interdiction du retour des animaux.
Pour rappel, la dermatose nodulaire contagieuse (DNC) n'est pas transmissible à l'homme et n'entraîne aucun risque alimentaire pour la viande et les produits laitiers.
Aux yeux du grand public, la dermatose nodulaire contagieuse s'est invitée de manière inattendue. À l'assaut des Alpes entre Albertville et La Plagne, la 19ème étape de la course cycliste masculine du vendredi 24 juillet avait été raccourcie d'une trentaine de kilomètres à la dernière minute pour éviter le col des Saisies, à la suite de la détection d'un foyer de la maladie au sein d'un troupeau.
"Devant le désarroi des éleveurs concernés et afin de préserver la sérénité de la course, il a été décidé, en accord avec les autorités, de modifier le parcours", s'étaient alors justifiés les organisateurs du Tour de France.