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Moutarde: pas de pénurie en vue cette année mais le changement climatique rend les agriculteurs prudents

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En Bourgogne, la récolte de graines de moutarde vient de démarrer et donne aux agriculteurs l'espoir de ne plus revivre les aléas climatiques qui ont fait chuter la production en 2022 et 2023, provoquant une pénurie de condiment.

En 2022, la production de moutarde était menacée par des récoltes de graines très inférieures à la normale. En cause, la météo en France et au Canada, l'un des principaux producteurs mondiaux, et la guerre en Ukraine. En 2023, la situation ne s'est pas améliorée pour les agriculteurs français qui n'ont récolté que 1,1 tonne par hectare. Cette année, l'optimisme est enfin de retour dans la filière.

"Nous sommes partis pour récolter entre 1,4 et 1,5 tonne, soit 30% de mieux que l'an dernier, mais ce n'est que le début de la récolte. Restons prudents", détaille à BFM Business Damien Baumont, vice-président de l'Association des producteurs de graines de moutarde de Bourgogne (APGMB).
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Des graines plus petites

La prudence de Damien Baumont, qui est aussi agriculteur à Barges, en Côte-d'Or, s'explique. D'abord, la récolte ne fait que démarrer et la suite dépendra de la météo. Par ailleurs, malgré cette hausse potentielle, la production reste toujours sous la normale. "Dans l'idéal, il faudrait revenir à 1,6 tonne à l'hectare. On y arrivera quand le climat nous laissera tranquille", affirme le représentant de l'APGMB avec une pointe d'ironie pour rappeler que l'agriculture est soumise aux aléas climatiques.

Pour illustrer ce propos, Damien Baumont note que si cette année la production est en hausse, les pluies et l'absence de soleil ont tout de même eu des répercussions.

"Cette année, le grain est un peu plus petit", constate l'agriculteur. "Nous sommes encore dans la norme, mais il ne faudrait pas descendre plus bas".

Dans des conditions idéales, il faut 1.000 grains pour obtenir trois grammes. Cette année, avec le même nombre de grains, on obtient 2,8 grammes. Il faudra donc plus de matières premières pour produire une même quantité de moutarde.

Des importations en baisse?

Par contre, aucune chance de voir les prix baisser. Comme le souligne Damien Baumont, les prix sont négociés en amont et les quantités déjà réservées par les producteurs de moutarde. Et cinq industriels consomment 80% de la récolte.

Cette année, les producteurs ont reçu des commandes pour 12.000 tonnes de graines. Sur cette quantité, 1.000 tonnes serviront pour la moutarde IGP (indication géographique protégée), des produits haut de gamme réalisés par les maisons comme Fallot ou Reine de Dijon. Pour la moutarde de table, les industriels français font appel au Canada qui leur fournit environ 80% des 35.000 tonnes de graines nécessaires.

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La hausse de la production en France pourra-t-elle faire baisser les importations? "Il est encore trop tôt pour le dire", répond Damien Baumont en rappelant que des effets ne seront pas visibles cette année.

"Comme ils l'ont fait en France, les industriels ont déjà réservé les productions de graines."

Au Canada, la récolte aura lieu en octobre. En 2022, la sécheresse a fait chuter de moitié la production de graines qui n'a atteint que 50.000 tonnes, selon le ministère canadien de l'Agriculture. Quant à l'Europe de l'Est, les importations ne se sont pas officiellement relevées et n'augmenteront pas tant que durera la guerre. Mais quoi qu'il en soit, la demande des consommateurs français sera satisfaite. La consommation annuelle moyenne de moutarde est d'un kilo par personne.

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco