"Mon voisin de train me laisse lire le plan stratégique confidentiel de Total": ces voyageurs qui font de grosses bourdes en se laissant espionner par leur voisin curieux

"Sylvain, je suis désolé pour toi mais à ton retour de vacances tu vas te faire virer." Dans une vidéo publiée sur Tiktok le 21 août, un internaute révèle avoir été témoin d'une conversation... qu'il n'aurait pas dû entendre.
Dans le TGV entre Paris et Marseille, Miloud Lahma raconte avoir entendu la responsable des ressources humaines (RH) se moquer d'un des employés (Sylvain) auprès d'une autre collègue, avant de suggérer de le licencier pour faute grave à son retour de vacances.
"La RH en a parlé par mail avec Mélanie ta supérieure hiérarchique", résume avec humour le témoin de cette conversation professionnelle.
"Profite bien du chômage mon Loulou. PS: dans le mail elle t'a tué Mel, mdr (abréviation de 'mort de rire')."
"Je reconnais que j'ai lu son nom sur l'écran à côté de moi et que je n'avais pas à le faire mais bon... ensuite elle a clairement dit son nom au téléphone en public", se justifie-t-il auprès de BFMTV.
Un motif de licenciement
La fameuse RH ne s'attendait pas à ce que des centaines de milliers de personnes (la vidéo de Miloud Lahma a fait 2,6 millions de vues) aient vent de cette histoire. En effet, travailler dans le train, sans respecter les règles élémentaires de confidentialité, peut être très dangereux.
"La RH pourrait être sanctionnée car elle n'a pas respecté son obligation de confidentialité", explique à BFM Business Agathe Lemaire, avocate en droit du travail.
"Si un salarié n'a pas été vigilant et que des données sensibles ont été connues de tous, ça peut constituer un motif de licenciement", ajoute-t-elle.
Malgré ce risque, nombreux sont les voyageurs à ne pas vraiment faire attention. En témoigne le nombre d'internautes qui jettent (plus ou moins discrètement) un coup d'oeil à l'écran de leur voisin... et racontent ce qu'ils ont vu sur les réseaux sociaux.
"On félicite mon voisin de train de chez Total qui me laisse lire sur son ordi le plan stratégique confidentiel proposé par le BCG (Boston Consulting Group)", raconte l'un d'eux sur X.
"Mon voisin de train bosse pour Shell et a un beau Powerpoint ouvert sur son ordi", écrit un autre dans un tweet.
"Ça me donne des sueurs froides autant de connerie"
Baptiste* prend régulièrement le train en première classe. "Et sur 20 ordinateurs, seuls 1 ou 2 maximum sont équipés de filtres de confidentialité, qui coûtent trois fois rien...", se désole-t-il auprès de BFM Business.
Un jour, un de ses voisins suivait une présentation sur l'installation d'un nouveau système dans une usine d'épuration. Il a quitté son siège sans verrouiller son ordinateur. "Je pouvais tout voir et j'aurais pu avoir accès à son ordinateur pendant 10 minutes", raconte-t-il.
"Bossant dans la propriété intellectuelle, ça me donne des sueurs froides autant de connerie", tacle-t-il.
"Pour qu'une invention puisse être protégée par un brevet, il faut qu'elle soit nouvelle.
Est-ce que le fait de laisser son écran à la vue de tout le monde est suffisant pour que l'invention ne soit plus nouvelle et donc non brevetable? Je ne sais pas, cela dépend des jurisprudences dans les pays", développe-t-il. Dans tous les cas, si un employé d'une entreprise concurrente était présent dans le wagon, il aurait pu obtenir des informations sur ce nouveau système.
Face à ces risques, la SNCF a même développer une campagne de prévention, en partenariat avec la Cnil (Commission nationale de l'informatique et des libertés). Elle conseille de toujours verrouiller ses appareils en quittant son siège, d'utiliser un filtre de confidentialité à apposer sur son écran, et de ne pas laisser traîner ses mots de passe sur un post-it.
Les chants gothiques et les photos explicites
Et ces petits espionnages des transports ne concernent pas que la vie professionnelle. Certains ne se rendent pas toujours compte de ce qu'ils montrent dans le train. "J'étais dans le TGV, et mon voisin, la cinquantaine, était en train d’envoyer des textos. Il remonte la conversation et je vois apparaître des photos très explicites d’une femme nue", raconte Léa à BFM Business.
"Souvent, les gens de plus de 35 ans ne pensent pas à utiliser Snapchat ou Instagram et notamment la fonctionnalité des photos instantanées qui se suppriment automatiquement au bout de quelques secondes", souligne la jeune femme.
Parfois, ces pratiques sont même complètement illégales. Comme lorsque Adrien a surpris un homme en train de regarder une vidéo pornographique dans le métro, ce qui est interdit par l'article 227-24 du code pénal en vertu de la protection des mineurs.
Enfin, les voyages en train peuvent donner lieu à des surprises plus étonnantes (et plus touchantes).
"Rien ne vaut mon voisin du train, qui regarde des vidéos de chants gothiques sur son ordi et qui a les larmes", s'amuse ainsi Maxime sur X.