ÉDITO. L’accord sur les retraites, compromis ou compromission ?

Attention à ce que le compromis politique ne débouche pas sur la compromission financière du pays. Nous restons sous la surveillance des marchés, les taux sont à plus de 3,40%, c’est-à-dire au niveau de fin 2011, en pleine crise de la zone euro. Nous sommes dans un moment grave, sans budget, sous la pression des marchés, il n’est donc pas possible de faire n’importe quoi.
Les négociations en cours avec le PS nous font-elles courir un risque?
Oui et non. En termes de finances publiques pures, le PS demande un allègement de l’effort d’une dizaine de milliards. À première vue, on pourrait se dire pourquoi pas. On n’est pas très loin des concessions apportées au bloc central, à la droite et à l’extrême droite, sous Barnier.
Le problème, ce n’est pas tant le quantum que le PS réclame sur la copie du PLF 2025 que les modifications qu’il prône. Des modifications qui pourraient gravement remettre en cause l’objectif de déficit de 3% du PIB en 2029.
Le problème, c'est les retraites?
Oui mais pas que. D’abord c’est toujours plus d’impôts: sur les entreprises, sur les hauts patrimoines, sur les marchés financiers… On en est à réfléchir à une taxe sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros doublée à une contribution sur les hauts revenus.
On peut se faire plaisir, mais je rappelle que plus de 100 milliards d’euros de capitaux ont fui la France depuis un an. Si on veut continuer le mouvement, taxer le flux comme le stock des richesses est la bonne méthode.
Sur les dépenses ensuite, c’est aussi zéro effort sur les fonctionnaires avec la suppression des trois jours de carence ou le maintien du nombre de professeurs, alors que le secondaire va accueillir 500.000 élèves de moins durant le quinquennat.
Zéro effort sur les collectivités locales non plus, alors que leurs dépenses ont augmenté de 64 milliards depuis le Covid.
Et puis bien sûr, la suspension de la réforme des retraites. Revenir à un âge légal de départ à la retraite à 62 ans, c’est du délire. Aucun pays en Europe ne songe à abaisser l’âge de départ à la retraite. Le seuil le plus bas c’est 64 ans partout ailleurs, et certains comme l’Italie sont en route vers les 70 ans. C’est là qu’on déraille complètement…
Et que dit Matignon?
Rien. Silence radio. Et rien ne dit qu’on en saura plus après la déclaration de politique générale. Comme le RN a d’ores et déjà indiqué dit qu’il ne voterait pas la censure le 16 janvier, pourquoi se dévoiler? On ne sort de l’ambiguïté qu’à ses dépens.
On est donc parti pour négocier pendant un bon moment encore, probablement jusqu’à fin février ou début mars, date de la fin de l'examen du projet de loi de finances et probablement du prochain 49.3. C’est à ce moment-là que tout va se jouer. On verra alors à quel niveau seront les taux.