Edito. Bonne nouvelle, les licenciements augmentent

La France a-t-elle mangé son pain blanc en termes d'emploi? La réponse est probablement oui. Alors que le pays a enregistré 0,6% de croissance en deux trimestres, l'économie a, dans le même temps, détruit plus de 53.000 emplois. Une mauvaise nouvelle? Pas forcément. Car cela veut dire une chose: les gains de productivité sont de retour. Et ça, c’est une excellente nouvelle pour le pouvoir d'achat des salariés.
Depuis la crise sanitaire, c'est le phénomène inverse qui se passait. L'emploi progressait plus vite que la croissance, et parfois même sans croissance. Une anomalie qui signifiait une chose: la productivité du pays reculait. Une très mauvais pour le pouvoir d’achat des salariés. D'ailleurs, le salaire de base a reculé de trois points par rapport à l’inflation depuis le Covid.
Pourquoi l’emploi a continué d’augmenter? Pour plusieurs raisons. D'abord parce qu'on l'a dopé à l’argent public, notamment en subventionnant massivement l’apprentissage et les entreprises après la crise. A l’OFCE, on estime à un million le nombre d'emploi en surplus de ce que l'activité aurait dû produire.
L'autre raison, c'est que les entreprises qui faisaient face à des problèmes de recrutement majeurs ont fait de la rétention de salariés, même quand elles n’en avaient pas vraiment besoin, tant que les carnets de commandes étaient pleins.
Mais cela ne dure qu’un temps. Aujourd’hui les carnets de commandes n’ont plus la même tête, l'offre a disparu, la machine est en train de s’inverser complètement. La multiplication des plans sociaux n'est pas surprenante.
Voir et prévoir
Mais comme dans tout phénomène économique, il y a ce qu’on voit immédiatement et les effets dans le temps qu’on ne voit pas tout de suite, mais qui sont bien réel. Le comprendre fait toute la différence entre un mauvais et un bon économiste, expliquait l'économiste Frédéric Bastiat: "l’un s’en tient à l’effet visible quand l’autre tient compte aussi des effets qu’il faut prévoir”.
Et qu’est-ce qu’on a fait, nous, commentateurs? On a beaucoup salué les créations d’emplois alors qu’il n’y avait pas de croissance sans voir le côté négatif de l’histoire qui était que cela pesait sur les salaires.
Alors aujourd'hui, ne nous concentrons pas uniquement sur le côté négatif des licenciements qui sont le révélateur d’une normalisation de la situation économique. Voyons aussi que la France vient de récupérer 1,8 point de productivité en six mois et que partant, les salaires devraient enfin rattraper l’inflation cette année. Le pouvoir d'achat va enfin progresser.
Bien sûr, cela ne veut pas dire pour autant que la montée du chômage est une bonne nouvelle. Qu'en sera-t-il l'année prochaine? Les plus optimistes comme la Banque de France tablent sur une quasi-stabilité de l’emploi. Les plus pessimistes sur près de 150 000 destructions d’emplois. Le chômage pourrait rapidement atteindre les 8%.
Politiquement, cela veut dire une chose: la seule promesse politique forte de la campagne d’Emmanuel Macron en 2022, c'est-à-dire le retour au plein-emploi, semble à mi-mandat déjà morte et enterrée.