Pacte de stabilité: l'UE progresse vers un accord

Paris et Berlin finalement sur la même longueur d'onde? Après une nuit de négociations à Bruxelles qui a permis un rapprochement franco-allemand, les Vingt-Sept espèrent trouver un compromis sur la réforme des règles budgétaires de l'UE "avant la fin de l'année".
"Nous avons fait des progrès essentiels", s'est félicité le ministre des Finances français Bruno Le Maire, en saluant le travail de la présidence espagnole du Conseil de l'UE, instance qui réunit les Etats membres. "Un accord au Conseil devrait pouvoir aboutir avant la fin de l'année. Cet accord fixera des règles cohérentes et reconnaîtra l'importance des investissements et des réformes. On continue!", a-t-il déclaré dans un communiqué à l'issue de huit heures de discussions.
Réforme du pacte de stabilité
Les ministres de l'Economie et des Finances de l'Union européenne s'étaient réunis jeudi soir pour un dîner afin de surmonter leurs différends et boucler une réforme du Pacte de stabilité et de croissance, initiée il y a plus de deux ans. Ce "corset budgétaire", créé à la fin des années 90, limite en théorie pour chaque pays le déficit des administrations publiques à 3% du PIB et la dette à 60% afin de coordonner les politiques budgétaires au sein du bloc et de préserver des finances saines.
Aux Etats membres qui dépassent ces seuils, le Pacte impose un ajustement drastique sous peine de lourdes amendes. Mais, en pratique, ces règles, jugées trop sévères, n'ont jamais été respectées et elles n'ont pas empêché l'explosion de l'endettement, tout en freinant l'investissement et la croissance après la crise financière de 2008. D'où un besoin de réforme sur lequel tout le monde s'accorde.
Mais les pays endettés du sud de l'Europe, à l'instar de la France, insistent sur des flexibilités supplémentaires afin de protéger l'investissement nécessaire pour la transition verte et les dépenses militaires engendrées par l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Tandis que les pays dits "frugaux" du nord, derrière l'Allemagne, réclament des contraintes pour atteindre un désendettement effectif dans l'ensemble de l'UE.
Règles plus adaptées
La proposition mise sur la table en avril par la Commission européenne prévoit des règles plus adaptées à la situation particulière de chaque pays. Les trajectoires budgétaires seraient à la fois plus réalistes et mieux appliquées. Le temps presse pour trouver un accord sur ce texte. Le pacte de stabilité a été désactivé depuis début 2020 pour éviter un effondrement de l'activité économique touchée par la pandémie de Covid puis par la guerre en Ukraine.
Il sera réactivé au 1er janvier. Une absence de réforme signifierait le retour aux anciennes règles. Un problème de crédibilité pour l'UE vis-à-vis des marchés financiers. La proposition de la Commission reprend les seuils emblématiques de 3% et 60% du PIB. Mais, aux Etats membres qui les dépassent, elle accorde plus de marge de manoeuvre pour revenir dans les clous.
Effort minimum
Concrètement, Bruxelles propose que les Etats présentent leur propre trajectoire d'ajustement sur une période d'au moins quatre ans afin d'assurer la soutenabilité de leur dette. Les efforts de réformes et d'investissements seraient récompensés par la possibilité d'allonger la période d'ajustement budgétaire à 7 ans, afin qu'il soit moins brutal. Surtout, le contrôle porterait sur l'évolution des dépenses, un indicateur jugé plus pertinent que les déficits qui peuvent fluctuer selon le niveau de croissance. Mais, afin de satisfaire l'Allemagne, la Commission a ajouté pour tous les pays en déficits excessifs un effort minimum de réduction du ratio de déficit de 0,5 point par an.
Berlin a en outre obtenu d'inscrire un effort minimum de réduction du ratio d'endettement de 1 point par an ainsi qu'un objectif de déficit public à 1,5% du PIB assigné aux pays les plus endettés, afin de préserver une marge par rapport au plafond de 3%. Paris estime l'ajustement trop sévère pour préserver les investissements nécessaires et engager des réformes économiques structurelles. Un compromis préparé dans la nuit par la France, l'Allemagne, l'Italie et la présidence espagnole doit encore être examiné par les 27. Selon Bercy, il permettrait de "prendre en compte l'impact de la hausse des taux d'intérêt sur la période 2025-2027" et "de donner les marges de manoeuvre nécessaires".