BFM Business
Union européenne

Électricité, contribution au budget, mandat de la BCE… Que pourrait obtenir le RN à Bruxelles en cas de victoire?

placeholder video
Dans une interview au Figaro, le président du Rassemblement national, en course pour Matignon, a indiqué qu'il se rendrait à Bruxelles dans le cadre de son premier déplacement à l'étranger.

Entre les deux tours des élections législatives, le président du Rassemblement national Jordan Bardella a accordé une interview au Figaro. Dans cet entretien, le "candidat" au poste de Premier ministre révèle qu'en cas de victoire dimanche, il effectuerait son premier déplacement à l'étranger en tant que chef du gouvernement à Bruxelles. Son objectif?

"Engager une dérogation aux règles européennes de tarification de l’électricité" pour "permettre à la France de retrouver l’avantage compétitif historique de la filière nucléaire".

Si le RN a abandonné ces dernières années l'idée d'un Frexit, au vu des conséquences du Brexit outre-Manche, et même d'une sortie de la zone euro, son programme économique comprend de nombreuses mesures en lien direct avec l'Union européenne. Dans certains cas, ces propositions se heurteraient pourtant à des obstacles pour pouvoir être appliquées.

Sortir des règles du marché de l'électricité, "une proposition peu crédible"

La proposition d'une sortie du marché européen de l'électricité était déjà portée par Marine Le Pen lors de la dernière élection présidentielle. Dans le cadre du récent scrutin européen, Jordan Bardella l'a reprise mais en modifiant rapidement la terminologie employée pour y préférer "une sortie des règles du marché européen de l'électricité".

Le but serait d'éviter une envolée des prix comme ce fut le cas lors de la crise énergétique en 2022 en décorrélant le prix de l'électricité français de celui du gaz.

Pour assurer que cette sortie est envisageable, les représentants du Rassemblement national citent régulièrement l'exemple de l'Espagne et du Portugal qui ont bénéficié d'une dérogation pour sortir provisoirement des règles entre juin 2022 et décembre dernier. Mais la situation géographique de la France est toute autre puisque l'Hexagone est au centre du marché européen de l'électricité et particulièment interconnecté avec ses voisins de par son positionnement.

"On est très content de pouvoir exporter une partie de notre production électrique pour notre balance commerciale", rappelle l'économiste spécialiste de l'énergie Jacques Percebois. "Et à certaines heures, on est très content de pouvoir importer de l'électricité moins chère."

De son côté, l'expert en énergie chez Colombus Consulting Nicolas Goldberg estime qu'il s'agit d'une "proposition peu crédible et contre-productive" qui fait peser un risque sur la sécurité d'approvisionnement et qui favorise en réalité la volatilité des prix. "Les échanges avec les pays voisins sont désoptimisés et il y a moins de convergence des prix tandis que les volumes ne sont pas garantis, ce qui nécessiterait de construire de nouvelles centrales", explique-t-il.

Une contribution au budget européen allégée

Dans un périmètre davantage budgétaire, Jean-Philippe Tanguy, souvent décrit comme "le monsieur économie du RN", fait part de sa volonté de respecter le pacte de stabilité et de croissance et notamment de ramener le déficit public sous la barre des 3% du PIB d'ici à 2027. Le programme économique du Rassemblement national n'a cependant pas encore fait l'objet d'un chiffrage précis alors qu'il prévoit un certain nombre de mesures qui pourraient s'avérer coûteuses en cas d'application.

Du côté de la Banque centrale européenne, le parti de Jordan Bardella souhaiterait modifier son mandat pour qu'il ne porte non plus uniquement sur la stabilité des prix mais soit tourné "vers l'emploi, la productivité et le financement de projets stratégiques de long terme". Mais cela devrait passer par une modification complexe des traités actuellement en vigueur, sachant que le gouvernement allemand ne semble pas favorable à un tel changement.

Autre mesure forte revendiquée par Jordan Bardella: la baisse de la contribution française au budget de l'Union européenne à hauteur de 2 à 3 milliards d'euros. Mais cela ne serait pas envisageable dans le plan pluriannuel 2021-2027 sur lequel la France s'est déjà engagée… sous peine de sanctions financières qui pourraient d'ailleurs survenir en cas de non-respect de n'importe quelle règle européenne existante.

Si la France refuse de s'acquitter des montants décidés par la justice europénne, la Commission peut alors retenir ces sommes sur les fonds européens destinés à l'Hexagone.

Timothée Talbi