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Licenciement, avancement au mérite… Faut-il réformer la fonction publique sans "tabou"?

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En annonçant vouloir "lever le tabou des licenciements dans la fonction publique" a mis le feu aux poudres. Mais la réforme qu'il entend défendre est-elle réellement explosive?

Stanislas Guerini, le ministre de la Fonction publique, souhaite réformer la gestion de la carrière des 5,7 millions de fonctionnaires que compte la France. Il se heurte à l’opposition des syndicats. Mais ce Macroniste de la première heure semble vouloir convaincre les agents eux-mêmes qu’il faut que les choses bougent.

Voilà pourquoi il leur promet une meilleure prise en compte de leur engagement professionnel dans l’évolution de leur carrière et, donc, du niveau de leur rémunération et en faisant évoluer les règles qui imposent de passer des concours pour changer de catégorie d’emploi. Bref, de se rapprocher de ce qui se fait dans le privé.

Comment les fonctionnaires sont-ils évalués?

Un exemple? La façon dont le travail des fonctionnaires est évalué. De prime abord, la règle ressemble aux pratiques en vigueur dans les grandes entreprises. Une fois par an, l’agent est reçu par son supérieur hiérarchique. Ensemble, ils discutent des objectifs qui lui ont été assignés. Ont-ils été atteints? Faut-il en définir de nouveaux? Ils doivent également parler aussi de sa manière de servir, mission première dévolue à chaque fonctionnaire.

A l’issue de cet entretien, le supérieur hiérarchique émet une appréciation, comme c’est le cas dans le privé. C’est ensuite que les choses divergent avec le privé. Les textes prévoient juste une "prise en compte" de cette appréciation dans l’"avancement de grade". Autant dire que son rôle reste modeste et que l’essentiel de l’évolution de carrière des agents de la fonction publique repose toujours sur l’ancienneté.

Mais c’est surtout cette petite phrase de Stanislas Guerini qui a mis le feu aux poudres:

"Je veux qu’on lève le tabou du licenciement dans la fonction publique" a annoncé d’emblée le ministre qui pilote cette réforme.

Formule choc qui, on pouvait s’en douter, a heurté les syndicats. Il faut rappeler, qu’en théorie, le statut des fonctionnaires ne les met à l’abri que d’un type de licenciement : le licenciement économique. Un fonctionnaire peut tout à fait être révoqué pour faute grave ou pour abandon de poste non justifié.

Treize licenciements pour insuffisance professionnelle en 2022

Invoquer son insuffisance professionnelle pour justifier son licenciement est également possible. Mais cela arrive très rarement. Stanislas Guerini évoque le chiffre de treize départs justifiés par une insuffisance professionnelle en 2022. Le tabou que veut lever le ministre pourrait se résumer ainsi: pourquoi, bien qu’autorisés, ces licenciements autorisés sont-ils aussi peu fréquents ?

Une façon d’interpeller directement les fonctionnaires. Ceux-ci pouvant constater par eux-mêmes que certains de leurs collègues assurent mal leur mission ou ont été mis "au placard" sans être remplacés et qu’ils en sont les premières victimes.

Pierre Kupferman
https://twitter.com/PierreKupferman Pierre Kupferman Rédacteur en chef BFM Éco