Marchés truqués chez EDF: les avocats du principal prévenu nient son rôle de "chef d'orchestre"

- - Alain Jocard - AFP
Les avocats du principal prévenu dans le procès des marchés truqués chez EDF, un ancien acheteur du géant de l'électricité qui favorisait certaines sociétés en échange d'argent ou de cadeaux, ont réfuté son rôle de "chef d'orchestre" du système de corruption.
"Il n'y avait absolument pas besoin de Christian M. pour que ces sociétés s'entendent entre elles", a plaidé l'une de ses avocates, Me Laura Kerzerho. Son seul réel pouvoir "était un pouvoir de négociation et d'avis sur l'attribution du marché et il a reconnu en avoir abusé en fournissant des informations", a-t-elle ajouté.
Depuis un mois, 38 prévenus et neuf sociétés comparaissent devant le tribunal de Nanterre pour avoir mis en place un vaste système de corruption sur le marché de l'entretien des centrales thermiques d'EDF.
Un millions d'euros de commissions et de cadeaux
Christian M., 64 ans et aujourd'hui retraité, est accusé d'avoir favorisé plusieurs sociétés en leur fournissant des informations confidentielles sur les appels d'offres. En échange, il aurait touché pour près de un million d'euros en argent ou cadeaux sous forme de travaux à son domicile, de vins de prestige ou du financement des études de ses enfants.
Plusieurs dirigeants des sociétés impliquées dans l'entente ont évoqué à la barre le "pouvoir de nuisance" de Christian M. les contraignant à participer au système, certains parlant même de "racket".
"Dans des systèmes équivalents, la société qui explique qu'elle a été forcée de verser telle ou telle somme, ce n'est pas très original", a ironisé Patrick Maisonneuve, l'autre avocat du principal prévenu.
Le procureur réclame 5 ans de prison ferme
"J'ai rarement vu de vrais rackettés aller déjeuner, passer un petit week-end, avec le racketteur", a-t-il surenchéri, citant pour appuyer ses propos plusieurs dialogues très amicaux entre les prévenus tirés des écoutes téléphoniques.
Me Maisonneuve a décrit un homme simple, loin du personnage avide, "cet espèce de monstre froid que certains ont bien voulu nous présenter". "Il demande un camping-car pour aller en vacances à La Tranche-sur-Mer car c'est son univers", a rappelé l'avocat.
Le procureur Guillaume Daieff a réclamé une peine exemplaire de 5 ans ferme contre Christian M., "à la hauteur du système corruptif mis en place" par le cadre pendant 10 ans. Une peine jugée sévère par Me Maisonneuve, qui a demandé à la présidente du tribunal Gwenaël Keromes plus de clémence, en citant plusieurs exemples d'affaires similaires ayant débouché sur des condamnations allant d'un an de prison avec sursis à quatre ans dont deux avec sursis.