"Notre pays ne produit pas assez" selon François Bayrou: où se situe vraiment le Français par rapport à ses voisins?

Production de bouteilles en verre à la Verrerie d'Albi à Saint-Juery, dans le Tarn. - Charly TRIBALLEAU / AFP
"Notre pays ne produit pas assez et il n'y a aucune raison acceptable pour un tel retard", a asséné François Bayrou lors d'une conférence sur les finances publiques ce mardi 15 avril.
Pour le Premier ministre, cette distanciation de la France est la mère de tous les maux, et notamment du problème de financement de la dépense publique.
"Si notre production par habitant était dans la même gamme que nos voisins européens, nous n'aurions pas déficit budgétaire", a-t-il assuré.
En effet, la France est distancée par certains de ses voisins avec un PIB par habitant de 43.000 euros en 2024, selon les données d'Eurostat. C'est 51.000 en Allemagne et 52.000 en Belgique. En revanche, la richesse par habitant est moins élevée en Italie (37.000) ou en Espagne (33.000).
Il est intéressant de noter qu'en 1980, le PIB par habitant était à peu près le même entre les États-Unis, la France et l'Allemagne. Celui des Français était même alors légèrement supérieur selon le FMI (12.940 dollars à l'époque) à celui des Allemands (11.150 dollars) et même des Américains (12.550 dollars).
Le taux d'emploi à l'origine du retard
Alors comment expliquer ce retard pris par la France?
"Le problème de la production est avant tout un problème de quantité de travail", explique Éric Dor, directeur des études économiques à l’IESEG School of Management.
Attention, les Français ne sont pas fainéants, loin de là. "La production de richesse réelle par personne en emploi est assez bonne en France, et par exemple supérieure à ce qui est mesuré pour l’Allemagne, mais quand même inférieure aux performances de plusieurs pays comme l’Autriche, les Pays-Bas…", détaille Eric Dor.
Le problème vient notamment du taux d'emploi (la part des 15-64 ans qui travaille), qui atteint 69% en France selon les données de l'OCDE contre par exemple 75% au Royaume-Uni et au Canada, près de 77% en Suède, 77,4% en Allemagne et même 82,5% aux Pays-Bas.
"On constate que la proportion de travailleurs, en pourcentage de la population totale, est très réduite en France", poursuit-il.
Dans ce domaine, la France est à la 25ème place sur le classement des 27 pays de l’Union européenne.
Cela s'explique par un taux d'emploi particulièrement faible aux deux extrémités de la courbe d'âge. Les jeunes Français entrent plus tard sur le marché du travail et les seniors partent plus tôt.

"Pour cela, il faudrait absolument accélérer dans la formation et notamment la formation continue, pour qu'un maçon par exemple, qui ne peut pas travailler jusqu'à 60 ans, puisse se reconvertir", suggère l'économiste.
Accélérer sur les technologies de pointe
Dans un second temps, une explication est également à trouver dans la productivité et dans la structure de l'économie d'un pays, c'est-à-dire dans ce qu'il produit comme type de biens ou services. Les pays qui sont spécialisés dans les activités à haute valeur ajoutée sont en effet avantagés.
"Dans un pays où il y a une industrie de technologies de pointe, la moyenne globale de la valeur ajoutée produite va remonter", explique Éric Dor.
"À l'inverse, dans un pays comme la Grèce où on retrouve beaucoup d'emplois dans les services comme la restauration ou le tourisme, la valeur ajoutée par travailleur est faible", illustre-t-il.
Comme l'Allemagne, qui s'est spécialisée dans les robots industriels et les machines-outils, "il faudrait qu'on trouve notre créneau sur le haut de gamme", conclut-il.