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"Il manquerait 200 millions d'euros": faute de moyens, des gendarmeries dans l'incapacité de payer leurs loyers

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La gendarmerie rencontre de nombreuses difficultés à payer les loyers de leurs locaux et logements de fonction dans certaines régions en France, ce qui menace l'équilibre des comptes de centaines de communes.

Le "trou" dans les caisses de la gendarmerie nationale s'élèverait à 200 millions d'euros. Relayée par Francebleu, l'information a été révélée par la sénatrice des Pyrénées-Orientales Lauriane Josende qui s'est rapprochée du ministère de l'Intérieur pour en savoir plus:

"Il m’a été indiqué, effectivement, que la gendarmerie n’était plus en capacité de payer ses loyers sur l’ensemble du territoire. À son arrivée, la nouvelle équipe gouvernementale s’est aperçue que la situation budgétaire était bien plus grave que prévu, et qu’il manquerait environ 200 millions d’euros dans les fonds attribués à la gendarmerie pour l’année 2024. En outre, la législation en vigueur ne permettrait pas au gouvernement de transférer des fonds d’un service à un autre."

D'après le cabinet de la sénatrice, ce sont 25 communes qui sont concernées dans les Pyrénées-Orientales, soit 38 casernes appartenant à des communes ou communautés de communes.

Une centaine de communes endettées

Au total, une centaine de communes françaises seraient concernées par ricochet, qui doivent puiser dans leurs propres ressources pour essuyer de nombreux retards sur les loyers. Contacté par Francebleu, Edmond Jorda, président de l’association des maires des Pyrénées-Orientales a constaté une multitude cas similaires dans l'Hexagone.

"J’ai été alerté par plusieurs collègues très préoccupés, confirme-t-il. Ces communes se sont endettées pour pouvoir construire les locaux de gendarmerie et les loyers leur permettent de payer les annuités d’emprunts. Si l’État ne paye pas ce qu’il doit, elles se retrouvent en grosse difficulté".

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18:12

"Ce n'est pas la faute des gendarmes"

Édith Pugnet, maire de Cabestany (Pyrénées-Orientales), fait partie du lot. Au micro de BFMTV ce matin, cette dernière faisait état d'un manque à gagner de "263.388 euros" depuis le dernier trimestre 2023, soit environ 3% de son budget de fonctionnement. Cela représente presque la moitié de sa dotation globale de fonctionnement, ce qui menace directement ses investissements consacrés "aux espaces verts".

"Ce n'est pas la faute des gendarmes mais celle de l'État", a-t-elle tenu à préciser. Il s'agirait d'une "erreur de budgétisation" qui a engendré ces loyers impayés. Le gel des crédits alloués aux ministères publics décidé cet été a sûrement joué, au même titre que la situation d'incertitude parlementaire dans laquelle le pays est plongé depuis la dissolution de l'Assemblée nationale début juin. Ce contexte est marqué par un allongement conséquent des délais de paiement de la part de l'État ainsi qu'un manque de visibilité sur les prévisions du budget à venir.

"Tout devrait rentrer dans l'ordre au début de l'année prochaine"

Invité de France Info ce matin, Laurent Saint Martin a indiqué qu’il allait regarder le sujet ''avec précision''. ''Il faut que tout cela se normalise'' a t-il ajouté, en expliquant que "le ministère de l'Intérieur a eu un budget en hausse toutes ces dernières années, que ce soit en termes d'effectifs, que ce soit en termes de moyens".

Le ministère de l'Intérieur a décidé ce mardi de reporter à décembre le paiement des loyers de septembre, octobre et novembre. Il indique avoir dû "faire des choix" et a décidé de "prioriser pour les semaines à venir les dépenses liées à l'activité opérationnelle".

Cette situation, révélée par France Bleu, est due à trois raisons, selon le ministère : une "insuffisance initiale de crédits", des "dépenses engagées en raison des événements en Nouvelle-Calédonie qui n'avaient pas été anticipées" et le "paiement des dépenses liées à la sécurisation" des Jeux olympiques qui "n'avaient pas été évaluées à leur juste niveau".

Les "loyers seront réglés", ajoute le ministère, qui dit attendre pour ce faire "la loi de fin de gestion et l'ouverture de nouveaux crédits en décembre" qui prévoit une enveloppe de 320 millions d'euros. "Il ne s'agit que d'un report de paiement, tout devrait rentrer dans l'ordre au début de l'année prochaine".

Pierre Berthoux avec Louise de Maisonneuve