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En cas d'arrêt de travail, les dirigeants de TPE, les indépendants et les médecins généralistes sont les travailleurs les plus vulnérables

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Swiss Life et Opinionway dévoilent en exclusivité à BFM Business les résultats de la deuxième édition de l'indice de vulnérabilité des travailleurs non salariés en matière de protection sociale.

Ils sont fragilisés par leur statut, et les économies envisagées par le gouvernement risquent d'accroître leur vulnérabilité. D'après une étude menée par Swiss Life avec OpinionWay, dévoilée en exclusivité à BFM Business, 81% des dirigeants de TPE, 72% des travailleurs indépendants et 72% des médecins généralistes "estiment que le contexte actuel est source d'inquiétudes", notamment en termes de protection sociale.

Et pour cause: contrairement aux salariés qui bénéficient de contrats collectifs d'entreprise, les dirigeants de TPE, indépendants et médecins libéraux doivent assumer à eux seuls la charge d'une complémentaire santé et d'une prévoyance. De fait, face aux coûts des contrats, tous n'ont pas forcément choisi d'être couverts contre les riques d'arrêt de travail, d'invalidité ou encore de décès. Si les contrats de prévoyance sont "largement adoptés par les médecins (78%)", ils le sont "plus rarement par les dirigeants de TPE (57%) et minoritaires chez les indépendants (37%).

Méconnaissance du système de protection sociale

Ces écarts s'expliquent par une certaine méconnaissance du système de protection sociale, selon Pierre François, directeur général prévoyance et santé de Swiss Life.

"La protection sociale pour les travailleurs non salariés, c’est un sujet assez bien connu des assureurs qui pratiquent ce marché, mais en même temps, on se rend compte qu’il n’est pas assez bien connu des premiers concernés", explique-t-il à BFM Business.

Résultat, si 43% des dirigeants de TPE, 41% des indépendants et 39% des médecins souhaitent renforcer leur protection sociale, "leurs attentes se heurtent à un système (...) jugé complexe", soulève l'étude. 76% des dirigeants des patrons de très petites entreprises et 73% des indépendants déclarent en effet rencontrer des difficultés pour bien en maîtriser les enjeux.

"Cette méconnaissance s'accompagne d'un sentiment de vulnérabilité toujours très élevé", pointe l'étude. Cette année, l'indice de vulnérabilité progresse à 67,2/100 chez les indépendants (en hausse de 2,4 points par rapport à la première vague menée en 2024), il se maintient à un niveau élevé chez les dirigeants de TPE (67,4/100, -1 point) et atteint 70,2/100 chez les médecins généralistes (qui ont été intégrés à l'étude cette année).

Peur des interruptions d'activité

La vulnérabilité des travailleurs non salariés se traduit notamment par leurs craintes d'interruptions plus ou moins longues de leur activité professionnelle. En effet, 8 travailleurs non salariés sur 10 déclarent que la perspective d'un possible arrêt de travail de plusieurs semaines ou mois leur fait peur.

"Même un arrêt de durée moyenne mettrait la majorité des travailleurs non-salariés en difficulté, ce qui pourrait influencer leurs choix de vie: prendre un congé de plusieurs semaines à l'occasion de la naissance de leur enfant serait impossible en raison des conséquences financières que cela entrainerait pour 7 dirigeants de TPE et indépendants sur 10", expose l'étude.

Il faut dire que 78% des dirigeants de TPE, 84% des indépendants et 83% des médecins considèrent leur couverture insuffisante en cas d'arrêt de travail. Qui plus est, 68% des dirigeants de TPE et 61% des indépendants redoutent aussi la survenue d'accidents du travail pour cette même raison. La peur de devoir s'arrêter longtemps est encore plus marquée chez les médecins généralistes (87%).

"Ce sentiment est également nourri par les expériences qu'ils ont pu avoir lorsqu'ils étaient en arrêt de travail", souligne l'étude: 61% des dirigeants de TPE et 51% des indépendants ont déjà été confrontés à des difficultés de prise en charge dans ce cas précis. "Cela peut s'expliquer par les durées des franchises, qui sont plus ou moins longues", avance le directeur santé et prévoyance de Swiss Life. Ces franchises correspondent en effet à la période pendant laquelle vous ne serez pas couvert par votre prévoyance en cas d'arrêt de travail. Elle s'élève généralement à 15 jours mais certains contrats plus avantageux l'abaissent à 7 jours, et d'autres, moins favorables, l'élèvent à 30 jours.

Ainsi, l'étude menée avec OpinionWay indique qu'"un travailleur sur deux ayant déjà eu un arrêt de travail a eu du mal à le faire prendre en charge": 48% des dirigeants de TPE et 52% des indépendants. Cette donnée est peut-être surestimée selon Pierre François: "je pense qu'il y a un peu de ressenti là-dedans, je dirais que c'est plutôt un gros tiers des travailleurs non salariés qui ont eu du mal à se faire prende en charge un arrêt", précise-t-il à BFM Business.

Vers un allongement de la carence de arrêts de travail

Il n'empêche: le plan de redressement des finances publiques de François Bayrou, s'il se concrétise, risque d'accentuer la vulnérabilité des travailleurs non salariés en matière de protection sociale. Parmi les principales mesures à l'étude, figurent notamment un allongement jusqu'à 7 jours du délai de carence des arrêts de travail. Pour les salariés, cela impliquerait un transfert de charges vers eux directement, ou leur emlyoyeur et la prévoyance complémentaire collective. Mais pour les dirigeants de TPE, indépendants et médecins généralistes, ils devront soit assumer eux-mêmes cette perte sèche de revenus, soit souscrire un contrat de prévoyance qui leur coûtera sans doute plus cher.

Or, selon les répondants qui jugent leur couverture prévoyance insuffisante en cas d'arrêt de travail, le maintien de la rémunération, l'accès à un accompagnement psychologique et la protection de la famille figurent parmi les principaux points faibles des contrats souscrits.

Caroline Robin