Inflation: après le "mars rouge", les industriels de l'alimentaire promettent un petit "juillet vert"

Ça y est, le prix devraient peut-être commencer à baisser dans la grande distribution. Les plus importants industriels de la consommation se sont engagés à reprendre les négociations avec les distributeurs ce mercredi à l'issue d'une rencontre avec le ministre de l'Economie.
D’ici la fin du mois ces 75 gros industriels parmi lesquels on trouve Coca Cola, Unilever, Nestlé ou encore Mars et qui représentent 80% du marché vont donc renégocier à la baisse un certain nombre de produits. Ceux qui avaient augmenté de plus de 10% à l’issue de la négociation annuelle en mars dernier et dans lesquels on trouve au moins une des matières premières dont le prix a baissé. La viande surgelée, les aliments pour animaux, les bonbons et gâteaux devraient en faire partie.
La baisse en rayon devrait intervenir dans un second temps, à l'issue des négociations. Le temps que les distributeurs reçoivent les produits au nouveau tarif et aient écoulé les anciens aux prix plus élevés. Après un "mars rouge", on espère donc désormais un "juillet vert".
Le premier ministre britannique hausse le ton
La pression sur les industriels a peut-être fini par payer. Entre les menaces du gouvernement, les plaintes des distributeurs, les critiques des consommateurs, le tout dans un contexte de baisse durable des prix des matières premières et des coûts de l'énergie, la position inflexible des industriels étaient devenue intenable.
Et c’est d’ailleurs le cas dans la plupart des pays d’Europe. Si la France est le seul pays à avoir des négociations commerciales encadrées dans le temps (elles ont lieu entre décembre et mars), chez nos voisins la baisse de l'alimentaire se fait aussi attendre. Avec 15% de hausse des prix de l'alimentaire en avril sur un an selon l'Insee, la France est même mieux lotie que la Belgique (+17,1%), l'Allemagne (+17,2%) et surtout que le Royaume-Uni (+19,4%).
Outre-Manche d'ailleurs, les grands distributeurs ont été convoqués ce mardi par le premier ministre Rishi Sunak et une commission d'enquête parlementaire a été ouverte pour savoir pourquoi ces derniers mois les prix de l'huile d'olive avait bondi de 49%, le cheddar de 42% ou encore le pain et les céréales de 20%.
À qui profite l'inflation?
Chez nos voisins comme en France, on cherche donc les "profiteurs de l'inflation". Et ils sont difficiles à désigner. En 2022, la grande distribution a par exemple rogné ses marges pour tenter de contenir la hausse des prix. Parmi les groupes cotés qui publient leurs résultats, on peut voir que Carrefour a réduit sa marge d'exploitation de 0,2 point (2,9% en 2022) et Casino de 0,4 point (3,4%). Il est ici question de marge nette (une fois déduit tous les coûts comme les salaires, les locaux, l'énergie) et non de marge commerciale qui est la différence entre le prix de vente et le prix d'achat et qui est évidemment bien plus élevée.
Auchan Retail assure de son côté l'avair abaissé de 0,7 point à 4,1% l'année dernière. Si la plupart de ces groupes ont vu leur chiffre d'affaires croître du fait des hausses de prix, leurs bénéfices n'ont pas suivi la même tendance.
C'est le cas aussi pour la plupart des grands industriels qui ont dans leur ensemble réalisé des marges un peu moins confortables l'an passé. La marge de Nestlé a été de 17,1% (-0,3 point) en 2022, celle d'Unilever de 16,1% (-2 points), de Danone de 12,2% (stable) et de Coca Cola de 30,7% (-1,8 point).
Les uns comme les autres peuvent donc difficilement être taxés de "profiteur de l'inflation" même s'il est vrai que les marges des industriels sont autrement plus importantes que celles des distributeurs. Mais cette différence est historique.
Les industriels n'ont pas fait le plus gros effort
Evidemment, difficile d'ignorer que le niveau de marge de ces géants de l'agroalimentaire est autrement plus important que ceux des distributeurs. Ce donc eux qui disposaient de la plus grande lattitude pour diminuer leurs marges. Or ils l'ont moins fait en proportion que les distributeurs.
Car un grand nombre d'entre eux n'en avaient pas besoin. Si les produits de grandes marques ont été globalement victimes d'arbitrage de la part de consommateurs contraints dans leur budget, certains best sellers des rayons ont eux été très performants malgré une inflation à deux chiffres.
Dans les boissons par exemple: +11,6 à +43% pour les références de Cristaline, +33% pour le Red Bull, +31% pour le pack de canettes de Coca Cola selon les données de NielsenIQ. Il s'agit là des quantités de produits achetés et non du chiffre d'affaires.

Au rayon alimentaire aussi, certains produits se sont très bien vendus. Comme le pot de Nutella de 1 kg (+28,3%), le camembert Président (+10,2%) ou les pains au lait Pasquier (+3%).

Malgré les hausses de prix, les ventes ont en registré parfois des niveaux records. Dans ce contexte, on comprend le peu d'empressement de certains industriels à revenir à la table des négociations…
