"Il n'y a ni Action, ni Amazon": dans quelles enseignes les dépenses des Français ont le plus augmenté en 2024?

Les chinois Shein et Temu sont des très loin les deux plateformes qui ont accaparé les hausses de dépenses de consommation des Français. Une percée fulgurante qui inquiète les commerçants traditionnels.

Le "made in China" a pris une nouvelle dimension en 2024. Jusqu'à présent, il était question de produits fabriqués en Chine et achetés par les consommateurs français dans les magasins ou les sites de vente de type Amazon.

Désormais ce sont les vendeurs chinois eux-mêmes qui gagnent notre quotidien. Certes des sites comme AliExpress du géant chinois Alibaba ne sont pas nouveaux dans l'Hexagone, mais leur poids dans la consommation française était somme toute très marginal.

Avec Shein et Temu depuis quelques années, les applications et sites de l'empire du milieu, c'est d'une toute autre ampleur. Comme en témoigne ce top 10 des enseignes de la société Circana qui ont le plus contribué à la croissance de la consommation dans le pays en 2024. Dans un contexte de déconsommation qui s'est poursuivi l'an passé (dépenses en baisse de 2,4%), les Français ont tout de même accru leurs dépenses dans un certain nombre d'enseignes.

Et ce sont les applications chinoises Shein et Temu qui ont capté l'essentiel de cette hausse. 12% pour l'une, 11% pour l'autre. Très loin devant les autres gagnants de l'année 2024.

A elles deux, Shein et Temu ont représenté 23% de la croissance des dépenses de consommation courante en 2024. © Circana

"Le plus inquiétant est probablement le top 2, occupé par deux acteurs chinois très bas prix, Shein et Temu, qui accaparent plusieurs milliards de la (faible) capacité à consommer des Français, analyse Emily Mayer de Circana sur LinkedIn. Cette croissance pose évidemment de nombreuses questions aux acteurs nationaux du commerce en termes de loyauté de la concurrence, mais leur expansion interroge aussi sur l'impact sur le marché de la seconde main (malgré la bonne position de Vinted)."

Pointée du doigt pour ses pratiques sociales loin des standards européens, accusée de pratiquer une optimisation fiscale sauvage (elle n'aurait payé que 273.000 euros d'impôt sur les sociétés en 2023 selon L'Informé), Shein est sur le point de devenir le premier vendeur en valeur de vêtements en France.

Avec un chiffre d'affaires estimé à plus de 1,6 milliard d'euros, le site lancé en 2014 par le très secret Xu Yangtian serait déjà plus gros que H&M, Primark et Kiabi et plus très loin de Zara qui possèdent pourtant plusieurs centaines de magasins chacun.

Une massification que la Poste constate au quotidien. Lors d'une audition parlementaire en octobre dernier, le PDG de la Poste Philippe Wahl avait indiqué que les plateformes Shein et Temu représentaient à elles deux 22% des colis traités (contre à peine 5% avant le Covid), soit 1% de plus qu'Amazon.

Le site américain est d'ailleurs le grand absent de ce top 10 des enseignes qui ont le vent en poupe. Tout comme le néerlandais Action au succès foudroyant depuis une décennie.

"Croissance plus raisonnable"

"Ils ne figurent pas dans ce top ce qui ne veut pas dire que ces enseignes ne progressent pas, précise Emily Mayer. Mais en tout cas moins fortement que les 10 mentionnées. Peut-être faut-il y voir une forme de croissance plus raisonnable après des années de progression très soutenue ainsi que l'effet de la concurrence féroce des deux enseignes en tête du peloton."

Sur la troisième marche du podium on retrouve le site de seconde main Vinted qui continue de progresser en France, mais qui semble subir les assauts des vendeurs chinois qui le concurrent sur les prix bas.

Pour autant les prix bas, le pouvoir d'achat et les économies ne sont pas les seuls moteur de la consommation des Français. Comme en témoigne le succès des enseignes comme Grand Frais (4ème du classement), Marie Blachère (9ème) et surtout de l'application de livraison de courses Jow (10ème).

"Ces trois acteurs témoignent de la recherche par les Français d’expertise métier, de large choix et aussi de simplification dans la façon de composer ses repas, observe Emily Mayer. De bons signaux et des idées pour les acteurs du secteur alimentaire."

https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco