Guerre en Ukraine: de combien le litre de carburant va-t-il augmenter ces prochaines semaines?

Les Français vont payer la guerre de Vladimir Poutine à la pompe. Alors que la baril de pétrole flambe depuis plusieurs semaines sous la menace de l'intervention russe, il a atteint ce jeudi des niveaux de prix jamais vus depuis août 2014, suite à l'invasion de l'Ukraine par l'armée russe. Le cours du Brent de la Mer du Nord a dépassé les 100 dollars en séance et se négocie ce vendredi matin vers 8 heures à 101,2 dollars le baril.
Depuis le 1er décembre dernier, le cours a grimpé de 56%. De 65 dollars, le baril est passé à plus de 100 dollars et pourrait même largement dépasser cette barre.
"Il existe un scénario dans lequel nous pourrions dépasser les 120 dollars, voire jusqu’à 150 dollars, assure John Driscoll, directeur de JTD Energy Services à CNBC. Étant donné que vous avez ce sous-investissement dans l’exploration, nous manquons de pétrole physique, nous manquons d’approvisionnement."
Vers une hausse de 10 centimes en moyenne dans les prochaines semaines?
Pas rassurant pour les automobilistes qui voient déjà le carburant battre records sur records à la pompe dans un contexte inflationniste. La semaine dernière le seuil symbolique de 1,70 euro le litre a été dépassé pour le gazole dans l'Hexagone (1,7051 euro en moyenne) avec une hausse hebdomadaire de 0,6 centime. Flambée encore plus importante pour le sans-plomb 95, carburant le plus consommé en France, qui a pris 1,3 centime sur la semaine, avec une moyenne à 1,7618 le litre.
De quoi craindre un carburant qui dépasse dans les prochaines semaines les 2 euros en moyenne à la pompe (niveau déjà dépassé par certaines stations parisiennes). Car le carburant actuellement vendu en station ne reflète pas les cours du pétrole actuel mais ceux d'il y a 45 jours à peu près. Le pétrole qui représente environ 30% du prix du carburant est acheminé en majorité par bateau depuis le Golfe.
Il y a donc un décalage de plusieurs semaines entre le prix du baril payé par les compagnies pétrolières et sa répercussion sur les consommateurs français. Le prix du carburant actuel s'établit donc sur la base d'un baril acheté aux alentours du 12 janvier. A cette date, le baril s'échangeait à environ 84 dollars. Il a depuis grimpé de plus de 20%.
Puiser dans notre réserve stratégique?
Le pétrole représentant actuellement environ 50 centimes du litre payé à la pompe, une hausse de 20% de ce dernier devrait mécaniquement entraîner une augmentation de plus de 10 centimes dans les prochaines semaines, avec des hausses progressives à attendre chaque semaine.
"Si jamais le baril reste à ce niveau-là pendant au moins une semaine, ce qui est probable puisque le conflit va certainement durer, le prix à la pompe augmenterait de deux ou trois centimes par rapport à aujourd’hui, avance ce vendredi dans Le Parisien Olivier Gantois, le patron de l’Union française des industries pétrolières (UFIP). En sachant que nous connaissons déjà des tarifs records…"
A terme, le gazole a de fortes chances de dépasser courant avril 1,80 euro le litre en moyenne en France et le SP 95 se rapprocher de 1,90 euro.
Si le pétrole continue de flamber et atteint les 120 ou 130 dollars le baril, alors la barre des 2 euros le litre de carburant devrait être franchie.
De quoi susciter des tensions sociales. Le président américain Joe Biden a d'ailleurs promis jeudi de puiser dans les réserves stratégiques de pétrole des Etats-Unis afin de soulager les Américains, inquiets de la hausse du prix des carburants. La réserve stratégique américaine est la plus importante au monde avec une estimation de plus de 600 millions de barils.
Entreposées dans un complexe de quatre sites souterrains le long des côtes du golfe du Texas et de la Louisiane, dans le sud du pays, ces réserves sont destinées à parer aux urgences, comme en 1991 au moment de l'opération "Tempête du désert" après l'invasion du Koweït par l'Irak, en 2005 après l'ouragan Katrina, ou en 2011 lors du soulèvement populaire de Libye.
La France aussi dispose d'une réserve stratégique. Environ 18 millions de tonnes sont répartis sur le territoire pour faire face aux situations d'urgence, ce qui représente deux mois de consommation courante à l'échelle nationale. L'Etat n'a puisé que trois fois dans ces stocks. La dernière fois c'était en 2016 lors de la contestation contre la loi Travail.
En dehors de ça, le gouvernement dispose de peu de marge de manoeuvre. Il n'y aura pas de baisse des taxes sur le prix de l'essence suite au versement du chèque inflation de 100 euros, avait-on appris la semaine dernière.
