Pourquoi l’essence est au plus haut alors que le pétrole est loin de son niveau record

La crise en Ukraine pousse irrésistiblement les cours du baril vers les 100 dollars. Le Brent qui sert de référence pour les prix du fioul et des carburants en France a dépassé les 96 dollars en séance ce lundi 14 février. Mais le record de l’été 2008 est loin d’être en vue. A l’époque, un pic historique avait été atteint le 2 juillet, lorsque le carburant avait légèrement dépassé les 146 dollars.
Pour autant, le gazole et le super sans plomb affichent aujourd’hui des niveaux bien plus élevés qu'il y a quatorze ans. Le ministère de la Transition écologique a publié les derniers prix moyens en France durant la semaine du 4 au 11 février: 1,70 euro pour le gazole et quasiment 1,75 euro pour le super sans plomb 95 (E10). Or à l'été 2008, lorsque le baril culminait à son plus haut niveau historique, les prix à la pompe n’atteignaient en moyenne que 1,45 euro pour le gazole et 1,50 euro pour le super sans plomb 95. Mais cet apparent paradoxe s'explique facilement.
On paie le pétrole en dollar et l'euro vaut nettement moins qu'en 2008
D’abord, il faut prendre en compte l’inflation. La hausse générale des prix depuis 2008 atteint près de 19%. Autrement dit 1 euro de 2008 vaut aujourd’hui 1,19 euro. Ainsi, en euros constants, c’est-à-dire à valeur comparable, en prenant en compte l’inflation, les prix du carburant de la mi-2008 (1,72 euro pour le gazole, 1,78 euro pour le SP 95) restent légèrement plus élevés que la moyenne actuelle.
Deuxième raison : le pétrole s’achète en dollars. Or le taux de change de 2008 n’a rien à voir avec son niveau actuel. L’euro culminait à alors à 1,60 dollar contre 1,13 dollar aujourd’hui. Dit autrement, le billet vert vaut 40% de plus aujourd’hui. Et cela pèse très lourdement sur nos achats de pétrole. A l’été, le baril à 146 dollars revenait à 91,25 euros. Le même baril échangé à 96 dollars revient aujourd’hui à 85 euros.
Combien d'heures un smicard doit-il travailler pour se payer un plein?
Cette dernière explication n’est d’ailleurs pas rassurante. Car si le baril devait voir son cours passer le cap des 100 dollars et l’euro perdre de sa valeur face au billet vert, les prix à la pompe devraient mettre encore plus à mal le budget des automobilistes.
Pour mémoire, à la mi-2008, pour faire un plein de gazole (40 litres), un salarié payé au Smic (6,84 €/h net) devait y consacrer 8 heures et 29 minutes de travail, soit 23 minutes de plus qu’aujourd’hui. Mais avec un gazole à 1,80 euro, le nombre d’heures à travailler pour ce même plein avec le niveau actuel du smic net (8,37€/h), atteindrait 8 heures et 36 minutes.
