Nice: Christian Estrosi peut-il vraiment interdire les bateaux de croisière géants dans le port de la ville?

Un bateau de croisière au large de Marseille (photo d'illustration). - GERARD JULIEN / AFP
Lors de la soirée de rentrée des Amis du maire, ce lundi 20 janvier, l’édile de Nice, Christian Estrosi a déclaré la guerre aux immenses bateaux de croisière qui acheminent des touristes dans sa ville.
"Les croisières qui polluent, qui déversent leur clientèle low-cost qui ne consomme rien, mais laissent leurs déchets derrière eux, et bien je le dis: ces croisières n’ont pas leur place chez nous", a-t-il lancé
Christian Estrosi s'est fixé l'échéance du 1er juillet 2025 et a affirmé qu'un arrêté sera rédigé pour interdire les embarcations de plus de 190 mètres et une capacité de 900 passagers sur le littoral niçois.
Au vu des annonces du maire de Nice, les jours de ces gigantesques bateaux sont suspendus à cet arrêté de la mairie. En réalité, la situation est plus complexe pour la municipalité.
Pas dans le cercle des compétences du maire
Dans les faits, l'interdiction d’une croisière ou non ne dépend pas de la mairie, mais du port et de la chambre de commerce à qui incombe la gestion des arrivées et des débarquements.
À Nice, Christian Estrosi possède toutefois un atout de taille en présidant la métropole Nice Côte d’Azur qui possède le port depuis que la CCI lui en a cédé les clés, le 3 juillet dernier. Une position qui lui donne théoriquement la possibilité d'interdire la circulation des méga-croisières, un pouvoir qu’il n’a pas en tant que maire.
"Il peut décider d'interdire ces bateaux dans le port et à 300 mètres de son littoral, mais seulement grâce à sa compétence de président de la métropole et pas en tant que maire et donc pas par un arrêté municipal", indique à BFMTV.com, Me Vanessa Godier, avocate spécialisée en droit de la mer.
"Cela va dépendre des contrats"
L'échéance du 1er juillet 2025, semble aussi compliquée à tenir. Les escales de ces croisières sont planifiées généralement deux ans à l’avance. Pour l’année 2025, 124 croisières doivent s’arrêter au port de Nice.
"Cela va dépendre des contrats passés entre les sociétés et le port. Un contrat doit respecter la réglementation en vigueur. S’il ne le fait pas, il peut être rendu caduque”, concède à BFMTV.com, Me Vanessa Godier.
Les bateaux déjà à 300 mètres du littoral
Si ces méga-bateaux sont amenés à être interdits dans le port, ils auront cependant toujours le droit de stationner à proximité de Nice à la vue de tous. "Selon la loi, la métropole fait autorité sur les eaux situées à 300 mètres de son littoral. Au-delà, c'est la préfecture maritime qui peut prendre les décisions", souligne Me Vanessa Godier.
"Actuellement, ces embarcations ne viennent pas dans le port de Nice, car il est trop petit. Elles se mettent à 300 mètres de lui et leurs passagers sont amenés jusqu’à la ville via des petites navettes", ajoute-t-elle.
Interdire ces croisières dans le port, ne protégerait donc pas la ville des touristes présents à bord des bateaux. À moins d'interdire ces petites navettes, ce qui serait "très compliqué", selon Vanessa Godier. Contactée sur cette possibilité, la métropole Nice Côte d’Azur n’a pas encore répondu.
Suivre l'exemple d'autres villes
Selon la direction interrégionale de la mer Méditerranée, 117 escales de croisières dans le port de Nice ont eu lieu en 2024 .
Pour lutter contre le surtourisme, des villes dans le monde ont réussi à interdire ces bateaux géants.
C’est le cas de Venise où une loi interdit aux paquebots de plus de 25.000 tonnes d'entrer dans le bassin de Saint-Marc et le canal de la Giudecca en plein centre-ville. De quoi interdire à 95% des bateaux croisières cet accès direct.