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TOUT COMPRENDRE. Pourquoi les ZFE sont-elles remises en cause?

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Face à la mise en place des zones à faibles émissions (ZFE), une proposition de loi vise à repousser leur réelle entrée en vigueur de 5 ans, avec notamment la verbalisation automatique, quand d'autres réclament leur suppression pure et simple.

Nouvel épisode dans le long feuilleton de la mise en place des zones à faibles émissions (ZFE) en France. Des parlementaires montent en effet aux créneaux ces dernières semaines pour revenir en arrière sur une mesure loin de faire l'unanimité.

Fin mars, un député RN a ainsi fait voter en commission un amendement visant à supprimer les ZFE, dans le cadre de l'examen en commission du texte sur la simplification de la vie économique. Une première étape car le texte doit tout de même ensuite être adopté par l'Assemblée nationale et le Sénat. Cet examen en séance doit débuter cette semaine, initialement prévu mardi 8 avril, le début des débats pourrait glisser à mercredi ou jeudi.

Une autre proposition de loi sera également présentée dans les prochaines semaines par 35 députes de droite, du Modem et du groupe Liot. Elle demande une suspension de ce dispositif, avec un moratoire de cinq ans. Une sorte de mise en pause, après des années de "pédagogie" et une cacophonie autour d'une possible verbalisation automatique des contrevenants.

"Les amendes automatiques à partir de 2026 risquent de faire l’effet d’une 'bombe sociale'", a résumé la députée Les Républicains Sylvie Bonnet, l'une des élues à l'origine de la proposition de loi.

Des manifestations avaient par ailleurs lieu ce week-end pour dénoncer les ZFE, notamment sous l'égide de la Fédération des Motards en Colère.

• Pourquoi mettre en place des ZFE?

Concrètement, l'objectif de ces ZFE a toujours été d'améliorer la qualité de l'air dans les grandes villes en excluant les véhicules les plus polluants de la circulation via le système des vignettes Crit'Air.

Des premières ZFE créées il y a maintenant près de 10 ans, 2025 marquait une étape importante: toutes les agglomérations de plus de 150.000 habitants devaient l'avoir créée.

Une application très théorique encore: seules quatre grandes agglomérations, Paris, Lyon, Grenoble et Montpellier, ont "interdits" à la circulation les véhicules Crit'Air 3 (Diesel d'avant 2011 et essence d'avant 2006). Mais sans verbalisation effective.

• Quand doit être lancée la verbalisation automatique?

C'est la grande question qui se pose alors que les députés veulent justement suspendre ou supprimer ces ZFE en raison de cette menace d'une verbalisation qui pèserait sur les automobilistes n'ayant pas la bonne vignette. Avec à la clé une amende de 68 euros.

Aucune métropole n'a pour le moment vraiment annoncé de mise en place de cette verbalisation automatique qui passerait par des caméras de lecture de plaques d'immatriculation.

A Lyon, le maire Grégory Doucet assumait en début d'année de passer à la sanction pour "faire appliquer la loi", mais les contrôles sont assurés par les agents de la police municipale.

Un article de la Tribune de Lyon évoquait de son côté "plus de 5.800 contraventions" dressées entre janvier et août 2024 mais à 85% pour sanctionner l'absence de vignette Crit'Air.

Deux échéances laissaient d'ailleurs penser qu'aucune initiative autour de cette verbalisation n'aurait été prise avant au moins deux ans et demi: les élections municipales en 2026 et les présidentielles en 2027.

Le maire de Montpellier s'est par exemple engagé à ne pas passer à ce volet sanction avant la fin de son mandat, notait un article du Point de janvier dernier.

L'Etat et les agglomérations se renvoient aussi sans cesse la balle sur qui devra installer et gérer le système de caméras pour cette verbalisation automatique.

"C’est une promesse de l’État (…) qui s’était engagé à les fournir aux communes concernées par la ZFE en 2022. Ces radars, c’est du bon sens", avait ainsi ajouté Grégory Doucet à l'antenne de BFM Lyon.

Mais encore une fois, rien d'officiel, et la mise en place d'une période pédagogique, une nouvelle fois en 2025, laissait sous-entendre une verbalisation au moins pour 2026.

• Pourquoi cette crainte autour des ZFE?

Ce flou autour d'une possible verbalisation des contrevenants cristallise les critiques autour des ZFE. Et pour cause, du jour au lendemain, des millions d'automobilistes se retrouveraient interdits de circuler dans la plupart des agglomérations françaises.

Rien que pour les Crit'Air 3, près de 9 millions de voitures seraient concernées au niveau national, d'après les données de AAA Data.

Si on prend le parc plus directement touché au quotidien par l'interdiction, dans la métropole du Grand Paris par exemple, on est tout de même à 1,12 million de véhicules Crit'Air 3 en Ile-de-France. Et même 1,58 million de véhicules si on ajoute les autres véhicules actuellement "interdits", les Crit'Air 4, 5 et les sans vignette.

• Quels aménagements possibles?

La mise en place des ZFE répond aussi à une politique de santé publique européenne visant à améliorer la qualité de l'air en baissant différents polluants. Le non-respect de certains seuils de pollution expose en effet à la France à des sanctions.

Supprimer les Zones à faibles émissions (ZFE) pourrait coûter à la France plus de 3 milliards d'euros d'aides européennes, selon une note de la Direction générale du Trésor. Une somme qui comprend un remboursement des subventions déjà obtenues et la perte des financements à venir.

Dans ce contexte, l'idée serait d'aménager la mise en place des ZFE plutôt que de les supprimer.

La ministre de la Transition écologique a par exemple proposé de ne rendre obligatoire les ZFE que pour des agglomérations qui dépassent des seuils réglementaires de qualité de l'air pendant trois des cinq dernières années. Ce qui reviendrait à recentrer ces obligations sur les métropoles de Paris et Lyon dans un premier temps. Une proposition qu'elle a réitérée ce mardi sur BFMTV.

Ce débat actuel permettra sans doute d'y voir un peu plus clair sur la mise en place de ces ZFE. De quoi aussi répondre à une certaine frustration de ceux qui ont changé de véhicule pour s'adapter à une réglementation annoncée mais qui ne s'applique (toujours) pas, comme pour ceux qui n'ont pas les moyens d'en acheter un plus récent dans un contexte de baisse des aides à l'achat.

https://twitter.com/Ju_Bonnet Julien Bonnet Journaliste BFM Auto