Faute d'équipe de modération, Twitter ouvre ses portes à l'ingérence étrangère

C’était une équipe de choc chargée par Twitter de contrer les "opérations informelles", ces campagnes coordonnées par des pays comme la Russie, la Chine et l’Iran, destinées à influencer l’opinion publique et déstabiliser la démocratie.
Mais l'unité a été quasiment démantelée avec le renvoi ou la démission de nombreux employés, laissant la plateforme vulnérable face à la manipulation venue de l’étranger, rapporte la BBC.
"La strate humaine a été complètement supprimée. Tout ce qu'il reste à Twitter sont des systèmes de détection automatisés", a expliqué un ancien employé au média britannique.
Plus tôt cette semaine, Elon Musk assurait qu’il y avait "moins de désinformation [sur Twitter] plutôt que plus" depuis sa prise de fonction, sans commenter l’existence de ces comptes dédiés au "trolling".
"Fermes à troll"
Pourtant, plusieurs réseaux de trolls pro-russes, pro-ukrainiens et pro-chinois, sont très actifs sur le réseau social ces dernières semaines. L’un de ces "fermes à trolls" soutient par exemple la guerre menée par Vladimir Poutine en Ukraine, ridiculise Kiev et l’Occident, et s’attaque à des publications indépendantes en Russe.
Si certains comptes ont été suspendus, d’autres sont toujours actifs, malgré la facilité avec laquelle ils devraient être détectés: leur pseudonyme Twitter comporte des chiffres aléatoires, et ils agissent de façon coordonnée.
En 2018, l’ingérence russe dans les élections américaines de 2016 a été attestée par le FBI, avec par exemple la création de faux comptes d’Américains. Facebook et Twitter avaient alors constitué des équipes pour lutter contre ces "opérations informelles". Twitter avait engagé des experts issus du monde de la cybersécurité, du journalisme, d’agences gouvernementales et d’ONG, maîtrisant des langues diverses comme le Russe, le Farsi, le Mandarin, le Cantonais, l’Espagnol ou le Portugais.
Un réseau coordonné propageant des informations fausses ou simplement négatives au sujet de l’armée française et des missions des Nations Unies au Sahel avait par exemple été démantelé en 2022.
Mais depuis, beaucoup de ces employés ont démissionné, désenchantés par le projet de Musk pour le réseau social. "Notre rôle était d’aider à rendre Twitter le plus sûr possible", résume un ancien enquêteur sur la plateforme. "Et cela ne nous a pas laissé l’impression qu’il s’agirait encore d’une priorité."