Guillaume Peltier avait-il le droit d'envoyer un mail aux adhérents LR pour soutenir Eric Zemmour?
C'est une affaire politique qui pourrait prendre un tournant judiciaire. Peu après avoir quitté Les Républicains pour soutenir Eric Zemmour, Guillaume Peltier a envoyé aux adhérents LR un mail les invitant à rejoindre la campagne du candidat d'extrême-droite.
Une initiative dénoncée par Christian Jacob, le président des Républicains. Ce dernier a saisi la Cnil, dénonçant l'utilisation du fichier regroupant les adresses mail des adhérents par une personne non habilitée.
Paralèllement au délit évoqué par Christian Jacob, Guillaume Peltier pourrait être visé sur d'autres points, tout aussi problématiques.
Consentement et finalité
Pour reccueillir le consentement d'un internaute quant à l'envoi de mails ou d'une newsletter, une finalité claire doit être précisée. Concernant les militants LR, la base de donnée a été construite à des fins de communication par le parti. Or dans le mail, Guillaume Peltier se présente explicitement comme "Porte-parole d'Eric Zemmour & vice-président de Reconquête".
"Le problème posé concerne notamment la finalité du traitement. Selon l'article 6 du RGPD (règlement européen sur les données personnelles, ndlr), le consentement est rattaché à une finalité précise, ici l'envoi de mails par LR. L'envoi d'un mail de la part d'un autre parti constitue une finalité différente, pour laquelle aucun consentement n'a été reccueilli" rappelle Suzanne Vergnolle, docteure en droit et spécialiste du droit des données à caractère personnel, auprès de BFMTV.
Auprès de BFMTV, Guillaume Peltier précise qu'il ne s'agit pas du fichier central des adhérents LR mais d'un fichier associé au mouvement "La Droite Forte", qu'il avait créé en 2012 avec Geoffroy Didier au sein de l'UMP, puis des Républicains, et qui a été dissous en 2018.
"Cette explication ne change pas le problème de la finalité du traitement des données. Un consentement accordé à un parti, même s'il s'agit de La Droite Forte, n'est valable que pour ce parti" précise Alexandre Archambault, avocat spécialisé en droit du numérique, auprès de BFMTV.
"Lorsque le signalement annoncé sera parvenu à la Cnil, il fera l’objet d’une instruction. Les services de la Cnil pourront, le cas échéant, demander tout complément d’information qui s’avérerait nécessaire, notamment sur le fichier et les conditions dans lesquelles il a été utilisé. A l’issue de cette phase d’instruction, si des manquements sont avérés, des mesures correctrices pourraient être adoptées" précise de son côté la Cnil à BFMTV.
A l'automne, les soutiens d'Eric Zemmour avaient déjà eu recours à des pratiques pouvant être qualifiées d'illégales aux yeux du RGPD. Ils avaient notamment multiplié des pétitions, en récoltant des adresses mails par la suite utilisées pour l'envoi de newsletters, sans pour autant récolter de consentement explicite à ce sujet.