Drones, cyberattaques, Starlink, désinformation: comment la tech a marqué un an de guerre en Ukraine

L'Ukraine et la Russie sont deux puissances technologiques. La guerre en Ukraine est avant tout une guerre hybride, les enjeux technologiques sont aussi importants que les enjeux territoriaux.
Au printemps, la Chine pourrait fournir des drones kamikazes à la Russie. D’ici le mois d’avril, Moscou devrait ainsi recevoir 100 drones du type ZT-180, capables de transporter une charge explosive de 35 à 50 kilogrammes. Un soutien non négligeable pour la Russie puisque les drones sont devenus une véritable arme de guerre, qui permet de prendre l’avantage sur son adversaire.
Cependant l’utilisation des drones n’est pas nouvelle dans le conflit qui oppose les deux pays. En 2014 déjà ceux-ci étaient utilisés lors du conflit au Nagorno Karabach.
Afin de multiplier les frappes et user son adversaire, l’Ukraine redouble d'inventivité. L'armée utilise des drônes commerciaux de la marque chinoise DJI pour les transformer en engins kamikazes, en y attachant des grenades anti-blindés. Ce système permet aux soldats d’être plus discrets et plus précis pour atteindre leur cible, notamment en milieu urbain. Après une mission de reconnaissance, les drones sont lâchés sur la cible, provoquant plusieurs explosions.
L'influence des entreprises tech
En Ukraine, les drones fonctionnent grâce au réseau Starlink de SpaceX, qui fournit une connexion Internet pour permettre au pays de continuer à se connecter. Starlink est un système d’accès à internet par satellite, devenu un outil indispensable pour le pays. Sauf que début février, la société d'Elon Musk a demandé à Kiev de ne plus utiliser ses réseaux pour contrôle des drones de combat, ni à des fins militaires.
Depuis le début de la guerre, Starlink a fourni environ 25.000 kits à l’Ukraine, qui ont été d’un soutien conséquent pour l’armée. Elon Musk a une position délicate dans ce conflit. Détenteur de Starlink mais aussi de Twitter, il a une influence non négligeable. Et ses fréquentes prises de position, souvent très critiquées, n'ont rien d'anodin.
Des entreprises technologiques privées prennent clairement position et fournissent de l’aide, c’est peut être là qu'apparaît la nouveauté, qui n’avait pas été observée dans d’autres conflits précédents.
Par exemple, Microsoft a fourni un système de sauvegarde des données de l'administration ukrainienne en transférant ses serveurs sur son cloud. Une solution numérique utile en cas de cyberattaque, qui ont été nombreuses au cours de cette première année de guerre. L’Ukraine en aurait recensé 4500 la visant, dont 25% ciblant le gouvernement, 13% le secteur énergétique, 12% les finances ou encore 10% attaquant des médias, selon le Microsoft Defense Digital Report 2022.
Quelques heures avant le début de la guerre, le 24 février 2022, la Russie visait le réseau de satellites ukrainiens KA-SAT, causant des perturbations chez Viasat, un acteur majeur des télécommunications par satellite, dans le pays.
Deux puissances numériques
Pourtant l’Ukraine possède une défense numérique reconnue, ayant fait face à de nombreuses cyberattaques russes. Dès le début de la guerre, le pays a compris l’importance de renforcer cette défense.
Le ministre du Numérique, Mykhailo Fedorov, a alors lancé un appel à la population. Toute personne ayant des compétences en informatique est alors invitée à participer à l’effort. L’IT Army ukrainienne a ainsi été créée, avec pour objectif de déstabiliser les réseaux numériques russes.
L’Ukraine utilise par ailleurs une application appelée Dïïa. Initialement conçue pour dématérialiser des documents officiels, elle sert désormais à partager des informations sur les positions des soldats russes. L'armée ukrainienne a aussi fait développer une application pour permettre à la population de prévenir l'armée en cas de présence d'engins militaires dans la zone.
Dans sa stratégie cyber, l'Ukraine compte beaucoup sur les données en sources ouvertes. En ce qui concerne sa communication, elle s'appuie sur les réseaux sociaux pour faire passer ses messages à l’Occident et rassembler l'opinion publique derrière elle.
De son côté, la Russie est très bien organisée. Toute son armée numérique fonctionne en réseaux, proches du Kremlin. Chaque entité a une mission bien définie. Parmi les plus connues figure Gamaredon, soupçonnée d'être liée aux services secrets russes. Le groupe est responsable de centaines de cyberattaques visant des acteurs privés ou publics en Ukraine, depuis près d'une décennie.
La responsabilité des réseaux sociaux
Mais la Russie a, elle aussi, subi des cyberattaques. Le 9 mai 2022, le site russe RuTube a été déconnecté et a mis trois jours à redémarrer. Le même jour, la télévision russe a également été visée pour diffuser des messages anti-guerre.
La guerre de l’information a une place centrale dans la stratégie d’influence des deux pays. Et les plateformes sont au premier rang de la diffusion de la désinformation. A commencer par Twitter. L'option payante Twitter Blue lancée par Elon Musk profite notamment aux comptes russes, qui gagnent en visibilité et diffusent ainsi en masse la propagande nationale.
Les plateformes tentent de contenir cette désinformation, même si cela reste timide. TikTok a indiqué avoir démantelé un réseau de désinformation russe qui ciblait les internautes européens. Au total 1700 comptes ont été recensés.
En mai 2022, YouTube assurait avoir supprimé 70.000 vidéos et 9.000 chaînes liées à la désinformation sur la guerre. Quant à Facebook, le réseau social a démantelé un réseau russe fin septembre. Au centre de l'opération figuraient environ 60 sites internet imitant les sites de médias reconnus, dont les journaux allemands Spiegel et Bild, le quotidien anglais The Guardian ou l'agence italienne ANSA.