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Un échec ou une promesse? Faut-il (déjà) enterrer le Vision Pro d'Apple?

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Près d'un an après sa sortie aux États-Unis, le Vision Pro n'a pas été la révolution espérée par Apple. Mais ce faux départ doit-il pour autant inquiéter l'industrie?

Un produit de niche. Lorsque, quelques mois après le lancement du Vision Pro, Tim Cook doit justifier le peu d'enthousiasme autour du casque de réalité mixte de son entreprise, le patron d'Apple l'assure: il ne s'agit pas d'un produit grand public. Un petit aveu d'échec pour Apple, qui voyait déjà son produit révolutionner l'industrie.

Le constat, quasiment un an après son lancement aux États-Unis, est en effet peu reluisant. Les applications spécifiquement imaginées pour le Vision Pro se font rares sur l'App store, si bien que le casque doit s'appuyer en priorité sur les applications iPad, qui ne sont compatibles que si le développeur le permet.

Une prouesse technologique

Il y a bien des présences importantes, comme Disney+, avec lequel Apple est proche, ou encore Tiktok, mais d'autres grands acteurs sont aux abonnés absents, comme Netflix et Spotify.

Résultat: quelques semaines, après sa sortie, les retours étaient nombreux et le site spécialisé The Information annonçait même une fin de production en décembre 2024.

Pourtant, tout n'est évidemment pas à jeter pour ce gadget à 4.000 euros.

Avec son Vision, Apple veut en réalité modifier profondément notre manière d'utiliser l'informatique. Le casque inaugure d'ailleurs ce que l'entreprise nomme "l'ère de l'informatique spatiale": autrement dit, pas besoin d'un ordinateur, le casque se suffirait à lui-même pour combler nos besoins, qu'ils soient professionnels ou non.

Mais comme nous l'écrivions dans notre test du produit, s'il s'agit bien d'une prouesse technologique indéniable, des questions restent en suspens sur son intérêt réel: "A-t-on vraiment envie de travailler des heures avec le casque sur la tête, coupé du monde? Pour beaucoup, et pour l'heure, la réponse sera non."

Un prix sans doute trop élevé

Malgré plusieurs mois de mises à jour, Apple n'a pas encore convaincu beaucoup de monde de la nécessité de dépenser 4.000 euros. Aux États-Unis, où le casque a été lancé le 3 février 2024, les retours sont néanmoins unanimes: la technologie est bluffante, notamment dans le suivi des yeux et des doigts, qui permettent de facilement s'immerger dans un environnement virtuel.

Mais les défauts sont évidents: le poids de l'appareil - gonflé sur l'avant -, son autonomie en deçà, couplée à une batterie externe qu'il faut porter sur soi, et plus globalement la fatigue qui s'installe après quelques heures en sa compagnie.

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Une fois l'effet "wahou" passé, on aurait même tendance à lorgner sur les futurs prototypes de lunettes connectées bien plus compactes.

Le constat est encore plus sévère chez ceux qui ont déjà testé la réalité virtuelle via les casques de Meta, les Quest. Évidemment, Apple a fait les choses bien et propose une intégration parfaite, des finitions à la hauteur du tarif, et une facilité de prise en main. Mais à la fin, il ne s'agit "que" d'un casque de réalité mixte.

Au prix de quelques concessions évidentes, le Meta Quest 3 ou 3S feront très bien l'affaire pour ceux souhaitant bénéficier d'un casque pour le loisir.

Un secteur loin d'être en crise

On pourrait croire que le problème du Vision Pro réside dans le fait qu'entre la vision d'Eddy Cue, qui a porté le projet, et la sortie effective du produit, le monde de la réalité virtuelle ou mixte n'a pas autant explosé qu'espéré. Mais ce serait alors nier la réalité: à Noël 2024, aux États-Unis, et grâce à des promotions importantes, les Quest 3 et 3S se sont vendus comme des petits pains, au point de voir l'application Meta Quest s'arroger la première place du classement de l'App Store. Le succès des Ray-Ban de Meta est également là pour montrer que le public est présent lorsque le produit lui correspond.

En vérité, Apple a peut-être eu les yeux plus gros que le ventre, espérant réitérer la surprise de l'iPhone. C'est d'ailleurs le projet important de l'ère Tim Cook, et voir qu'il ne décolle pas tant que ça est sans doute difficile à admettre pour celui qui lâchera les rênes d'Apple en 2030.

Pour autant, le Vision Pro est une étape. Un premier jet qui peut rappeler sur bien des aspects le premier iPad, lequel montrait une route à prendre, que ce soit pour Apple ou ses concurrents. Quand on regarde les progrès réalisés par Meta pour améliorer le suivi des mouvements sur ses Quest, on ne peut que remercier Apple d'avoir véritablement bousculé le paysage.

À l'avenir, et comme le prouvent les nombreuses déclarations d'Apple sur le sujet, le Vision Pro conservera sa place sur le segment professionnel, mais sa partie applicative sera soutenue par un modèle moins onéreux et donc bien plus accessible au commun des mortels.

Le Vision Pro n'est donc pas un échec, loin de là. Mais ce n'est pas un succès non plus. Il est une promesse d'une manière de réaliser des tâches en bousculant nos habitudes. Mais à ce stade, la promesse n'a jusqu'ici pas encore donné lieu à une réponse de la part des consommateurs. À charge d'Apple de faire les bons choix désormais.

Sylvain Trinel