Contrôle de l'âge, retrait des vidéos... Les propositions du Haut conseil à l’égalité pour les sites pornographiques

Un texte très commenté. Le Haut conseil à l’égalité (HCE) a dévoilé ce mercredi un rapport sur l’industrie de la pornographie, qui dénonce un "système d’exploitation sexuelle à l’échelle industrielle".
Intitulé "Pornocriminalité: mettons fin à l’impunité de l’industrie pornographique", le texte critique de nombreuses pratiques récurrentes du secteur, comme la reproduction de violences physiques, sexuelles ou verbales envers les femmes.
Pour lutter contre ce qu’il présente comme des dérives illégales, le HCE termine son rapport par des propositions pour mieux encadrer les sites pornographiques, la plupart tirées d'une note publiée en juin. Quelles sont ces recommandations?
• Imposer le contrôle de l’âge sur les sites pornos
Parmi les propositions du HCE: "donner le pouvoir à l’Arcom (le gendarme des médias et du numérique, ndlr) de bloquer les sites pornographiques ne mettant pas en place un contrôle d'âge effectif". De fait, ces plateformes ont déjà l’obligation légale de s’assurer que tous leurs utilisateurs français ont plus de 18 ans.
Mais actuellement, aucun site pornographique ne vérifie vraiment si ses utilisateurs sont majeurs, et se contentent d’une déclaration sur l’honneur. Un dispositif considéré comme insuffisant: la moitié des garçons de 12 ans se rendent chaque mois sur ces sites, selon l'Arcom.
Plusieurs sites ont déjà été mis en demeure par l’Arcom et menacés de blocage devant le tribunal de Paris. Mais la procédure n’a pas abouti, car les plateformes concernés ont déposé un recours devant le Conseil d’État, estimant qu’il n’existe pas de système de vérification d'âge idéal sur internet – ce qui rendrait la loi inapplicable.
"C’est aux sites pornographiques de déployer un dispositif technique conforme au droit, pas aux autorités", rétorque le HCE.
• Permettre le retrait des contenus violents
Autre possibilité envisagée par le HCE: permettre à la plateforme Pharos, qui sert à signaler des contenus illégaux trouvés sur internet, de bloquer voire retirer des vidéos comportant des "atteintes volontaires graves à l’intégrité de la personne". Le tout au titre de l’article 222-33-3 du code pénal, qui punit des mêmes peines les violences et leur enregistrement.
Un motif contesté par certains experts. "Les acteurs et actrices sont des… acteurs, quand bien même ils réalisent des 'actes sexuels non simulés", rappelle auprès de France Inter Mélanie Jaoul, maîtresse de conférence en droit privé et présidente de l'Association des alliés et alliées de TDS. Si une œuvre de fiction comme un film de guerre n’est pas concernée par cet article, difficile de savoir s'il pourrait s'appliquer aux films pornographiques.
• Permettre le retrait des vidéos non consenties
Le HCE recommande également de permettre à toute personne figurant dans une vidéo à caractère sexuel de pouvoir demander son "retrait", "sans autre condition que de prouver qu’il s’agit d’elle" sur la vidéo. Ce droit de retrait doit être "simple et effectif".
Cette mesure permettrait-elle le retrait des vidéos présentes sur les plateformes pornographiques, ou sur internet en général? Contacté par Tech&Co, le HCE n’a pas immédiatement répondu.
• Soutenir les projets de régulations européennes
La plupart des principaux sites pornographiques n’étant pas basés en France, leur régulation ne passe pas uniquement par le droit français. C’est pourquoi le HCE propose notamment d’inclure "tous les sites pornographiques" dans la liste des très grandes plateformes du DSA, le règlement européen qui leur impose des exigences renforcées.
Le HCE exhorte également le législateur français à "soutenir le règlement européen sur la pédocriminalité en ligne". Un texte soutenu par de nombreuses associations, qui permettrait de mieux lutter contre la diffusion de contenus pédocriminels; mais également très critiqué, car dans sa forme actuelle, il pourrait imposer aux plateformes de rompre le chiffrement des discussions – ce qui pourrait menacer le secret des conversations et la vie privée des internautes.