"Ça pourrit la vie des agents": pourquoi le logiciel dédié aux plannings agace les agents de la SNCF

Rémunération, primes spécifiques... Les causes de la mobilisation de ce mois de mai 2025 sont nombreuses. Mais l'autre sujet qui cristallise les tensions entre la direction de la SNCF et les cheminots (conducteurs et contrôleurs), c'est celui de la refonte de l'organisation des plannings.
En effet, selon les syndicats, le logiciel censé optimiser les plannings, notamment grâce à l'intelligence artificielle, déstabilise les horaires du travail. De nombreux cheminots seraient ainsi soumis à des changements de dernière minute.
"Une chance sur deux que les journées sautent"
"Ce logiciel a été mis en place il y a quatre ans", rappelle Fabien Villedieu, délégué syndical de SUD-Rail, à Tech&Co. "Au début, il nous prévenait de nos horaires un an à l'avance. Puis, c'est descendu à 6 mois, puis à trois." Pire, "certains collègues contrôleurs se rendent compte que le logiciel peut modifier leurs journées quasiment 24 heures avant."
En effet, comme le stipule la convention collective nationale de la branche ferroviaire, les salariés doivent être informés des modifications de leur planning au plus tard 24 heures à l'avance. Un délai qui tombe à une heure pour la modification des heures de travail. Mais ces cas doivent rester exceptionnel.
"Des modifications de dernière minute, ça arrive très souvent", poursuit-il. "Il y a une chance sur deux que les journées sautent ou que les horaires soient complètement différents."
"On n'est pas des machines, on est quand même des êtres humains", peste-t-il. Dans ces conditions, impossible pour les agents de s'organiser, donc. "Avant, les roulements permettaient de se projeter. En quatre ans, les conditions de travail se sont dégradées", observe celui qui rappelle que ses collègues ont par exemple des difficultés à programmer un rendez-vous médical ou à s'organiser pour récupérer leurs enfants.
"On ne remet pas en cause la logique d'optimisation et de productivité", insiste Fabien Villedieu. "Quand les journées étaient modifiées à la marge, ça n'était pas un problème. Mais là, ça pourrit la vie des agents, qui sont déjà en horaires décalés avec des week-ends en semaine (...) C'est l'enfer."
Un audit mené par la SNCF
De son côté, la direction de la SNCF indique que selon ses calculs, la plupart des modifications sur les emplois du temps sont annoncées au moins un mois à l’avance, et seulement dans 3 % des cas en moyenne du jour au lendemain, rappelle 20 Minutes. Un chiffre réfuté par Sud-Rail.
"Les contrôleurs ne vont pas se mettre en grève pour 3% de journées décalées", s'insurge le délégué syndical. "Etant donné les pourcentages de grévistes, il y a un vrai problème. C'est loin d'être marginal."
La direction de la SNCF a admis, le 23 avril dernier, que "des améliorations" devaient être "apporter sur la visibilité pour les cheminots". Elle a également promis "une meilleure visibilité de six mois sur les périodes de repos et une meilleure réactivité suite aux demandes de congés".
Le logiciel de gestion des planning sera audité par un expert externe et des "groupes de travail" vont être réunis. "La SNCF a reconnu qu'il y avait un problème et souhaite trouver des solutions", confirme Fabien Villedieu, qui regrette toutefois que les conclusions de cette enquête ne soient rendues qu'en septembre.