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L Edito de Raphael Legendre

ÉDITO. Budget: pourquoi la stratégie de l’impôt n’est (vraiment) pas la bonne

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Avec 15 jours de retard, les députés ont enfin commencé l’examen de la première partie du projet de loi de finances, consacrée aux recettes. Des recettes qui, peut-on parier, ne seront pas au rendez-vous.

Le gouvernement ne lèvera pas la moitié de ce qu’il compte ramasser en taxes et impôts nouveaux l'année prochaine - on peut en prendre le pari - et donc il y a toutes les chances que les objectifs de réduction des déficits ne soient pas respectés.

D’abord, parce que cela fait deux ans maintenant que les recettes ne sont plus au rendez-vous. Des dizaines de milliards d'euros de rentrées fiscales se sont évaporées, c'est pour cela que le déficit a dérapé de 4,9% à 5,5% en 2023 et de 4,4% à 6,1% en 2024. Cette année, les recettes de l’État seront même en baisse alors que la croissance progresse. C’est inédit.

La croissance justement - ou plutôt le manque de croissance! - c’est la deuxième raison qui explique que les recettes ne seront pas au rendez-vous du redressement des comptes publics. L’OFCE a publié mercredi une étude estimant que la croissance ne devrait pas être de 1,1 % en 2025 comme l’anticipe Bercy, mais de 0,8 % seulement, du fait des mesures récessives dans le budget. Ce sera forcément moins de recettes.

Enfin la troisième raison, c'est que le modèle de simulation avec lequel travaille Bercy, Mésange, est un modèle keynésien un peu mécanique qui estime, comme trop de monde à Bercy, que quand on augmente une taxe de 10%, elle rapporte 10%. Le raisonnement est statique. Que l’on soit entreprise ou ménage, on reste rarement immobile face au fusil-mitrailleur du fisc.

Déjà, des stratégies d'évitement se mettent en place face à la surtaxe d’IS comme pour le mécanisme sur les très hauts revenus. Deux mesures qui, je prends le pari, ne rapporteront pas la dizaine de milliards escomptés. Ce sera beaucoup moins, comme la contribution sur la rente des énergéticiens (la Crim) qui devait rapporter 12 milliards d'euros et n'a atteint que 600 millions d'euros au final.

L’Edito de Raphaël Legendre : Impôts, ce n'est pas la bonne stratégie - 17/10
L’Edito de Raphaël Legendre : Impôts, ce n'est pas la bonne stratégie - 17/10
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La maîtrise des dépenses, seul levier efficace

Les impôts, on le constate depuis deux ou trois ans, ne rentrent plus. On ne maîtrise plus leur évolution.

Emmanuel Macron avait basé toute sa stratégie de finances publiques sur la croissance, censée être pourvoyeuse de recettes, on voit que ce n’est plus le cas. Le seul outil véritablement à la main de Bercy, pilotable avec précision par les pouvoirs publics, c’est l'évolution de la dépense publique.

Il n’est jamais trop tard pour bien faire ; temps de se relever les manches. Encore faut-il avoir des hommes d’État à la hauteur de ce défi majeur. Et vu les tombereaux de taxes nouvelles votées hier, ce n’est pas gagné.

Raphaël Legendre