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Qui est Arm, cette pépite britannique rachetée 40 milliards de dollars, présente dans tous nos smartphones

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"Acorn RISC Machine" ne fabrique pas de puces en tant que telles mais des architectures utilisées par quasiment tous les producteurs de processeurs dédiés aux smartphones, tablettes, appareils photo numériques et pas seulement...

C'est l'un des rachats les plus importants dans le domaine hautement concurrentiel des puces informatiques. L'américain Nvidia, champion des cartes graphiques, a en effet annoncé l'acquisition du britannique Arm pour la bagatelle de 40 milliards de dollars au japonais Softbank son propriétaire. La moitié de cette somme sera versée en cash, l'autre en actions.

Si le grand public connaît les grands fondeurs (fabricants de puces) comme Intel ou Qualcomm, très peu connaissent Arm. Ses technologies sont pourtant présentes dans tous les smartphones de la planète et dans nombre de dispositifs informatiques, des serveurs aux objets connectés.

  • Que fait Acorn RISC Machine (Arm)?

"Acorn RISC Machine" pour Arm ne fabrique pas de puces en tant que telles mais des "architectures" sur lesquelles reposent et fonctionnent les processeurs qui font tourner 90% des smartphones de la planète, 80% des appareils photos numériques et 35% de tous les appareils électroniques (à l'exception des ordinateurs qui utilisent une architecture différente développée par Intel).

Tous les fondeurs de la planète utilisent ces architectures qui, avec le temps, sont devenues incontournables.

Son modèle économique est celui des licences: un fabricant de processeurs (Qualcomm, Samsung, Huawei...) doit alors payer de très juteuses royalties à Arm afin de pouvoir utiliser ses technologies.

  • Pourquoi Arm a autant de succès?

La grande force d'Arm est de proposer une architecture simple et surtout offrant une faible consommation électrique. Idéal donc pour l'informatique embarquée.

Le succès d'Arm a donc été parrallèle à l'explosion des ventes de smartphones dans le monde mais aussi des appareils photos numériques, des tablettes...

  • Pourquoi est-ce une bonne affaire pour Nvidia?

Le fondeur américain est déjà le leader mondial des cartes graphiques pour ordinateurs. Il devient via cette opération, le leader mondial des architectures pour appareils mobiles.

Mais pas seulement. Arm est également présent dans les serveurs, les infrastructures, les supercalculateurs, l'intelligence artificielle, la 5G, les objets connectés. Nvidia se positionne ainsi clairement dans les secteurs d'avenir.

D'autant plus que les produits de Nvidia sont aussi de plus en plus présents dans l'intelligence artificielle et les centres de données (datacenters).

  • Pourquoi c'est une bonne affaire pour Softbank?

Le géant japonais des télécoms avait racheté Arm en 2016 pour 24 milliards de livres sterling, soit 29 milliards d'euros à l'époque. Il empoche donc quatre ans après une jolie plus-value puisqu'il empochera 33,7 milliards d'euros de cette vente.

Rappelons que cette cession entre dans le cadre du plan de redressement de dettes de Softbank et de recentrage de ses activités.

  • Quels changements dans le secteur des semi-conducteurs?

Nvidia devient d'un coup d'un seul, le challenger d'un des leaders mondial des processeurs qu'est son compatriote Intel. Mais ce dernier, qui équipe la quasi-totalité des ordinateurs fixes et portables de la planète, n'a jamais réussi son virage dans la mobilité.

L'analyste technologique Avi Greengart a tweeté lundi qu'Arm, va "étendre les marchés auxquels elle peut s'attaquer tandis que Nvidia va obtenir de meilleurs processeurs graphiques pour les centres de données et l'internet des objets".

C'est donc un coup dur pour Intel. D'autant plus que son précarré, les ordinateurs classiques, commencent également à s'ouvrir à Arm. Apple a ansi officiellement annoncé qu'il abandonnait pour ces fameux Mac les technologies d'Intel utilisées depuis 2005, au profit de celles d'Arm.

  • Des risques concurrentiels

La vente à Nvidia "va faire sourciller" de grands acteurs mondiaux des semi-conducteurs commente à l'AFP Amir Anvarzadeh, stratégiste chez Asymmetric Advisors basé à Singapour.

Certains se demandent si l'approche ouverte d'Arm, sous pavillon américain, sera maintenue dans un contexte de tensions entre les Etats-Unis et la Chine. Arm a en outre accordé des licences sur sa technologie à Intel, Qualcomm et Samsung Electronics qui sont des concurrents de Nvidia. "Ils auront besoin de garanties", ajoute-t-il.

"Nous allons maintenir la neutralité" de Arm vis-à-vis de ses clients ainsi que son modèle de licence ouverte, a promis le patron de Nvidia, Jensen Huang, dans une lettre à ses employés publiée sur le site du groupe.

En tout cas, l'autorité britannique de la concurrence devra donner son feu vert ce qui ne sera pas une mince affaire vu le risque de monopole sur le marché.

  • Une perte de souveraineté?

Michael Hewson, analyste de CMC Markets, remarque pour sa part que la méga-opération de cession pourrait faire froncer les sourcils à Downing Street soucieux de protéger les milliers de personnes employées par Arm au Royaume-Uni.

Jensen Huang a annoncé que le siège de Arm resterait bien à Cambridge (Angleterre), où Nvidia prévoit par ailleurs d'implanter un centre mondial de recherche dans l'intelligence artificielle.

Ce qui n'a pas rassuré Hermann Hauser, le fondateur d'Arm, qui dans un entretien à la BBC évoque un "désastre absolu pour Cambridge, le Royaume-Uni et l'Europe". "C'est la dernière entreprise technologique européenne de dimension mondiale et elle est vendue aux Américains", s'est-il insurgé.

Par Olivier Chicheportiche avec AFP