BFM Business
Economie

Mystérieuses offensives contre les mutuelles Maaf, MMA et GMF

placeholder video
Une association, inconnue jusque-là, a déposé une série de plaintes contre le groupe Covéa suite au rachat du réassureur Partner Re.

C’est une nouvelle guerre qui commence contre le premier assureur français Covéa. Mais personne ne sait vraiment qui l’attaque. Depuis fin mars, une association multiplie les procédures judiciaires contre le groupe qui chapeaute les mutuelles Maaf, MMA et GMF.

L'"Association pour la sauvegarde des principes mutualistes" (ASPM) a déposé, vendredi dernier, une nouvelle requête contre Covéa auprès de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF).

Elle l’accuse de dévoyer son modèle mutualiste et de s’accaparer les primes des 11,6 millions de clients et sociétaires. Son président, Dominique Paillé, dénonce le fait que chaque sociétaire (détenteurs de parts) "adhère à une mutuelle mais que ses primes vont à une société commerciale", en l’occurrence Covéa.

Il pointe précisément que le groupe utilise ses excédents de capital pour racheter Partner Re, un réassureur basé aux Bermudes, pour 9 milliards de dollars. Et réclame l’abandon de cette opération et la restitution de cette somme aux sociétaires, soit près de 1000 euros chacun.

Opposition au rachat de Partner Re

La fronde de l’ASPM a commencé fin mars avec une assignation contre Covéa devant le Tribunal judiciaire de Paris pour "pratiques commerciales trompeuses, escroquerie et abus de confiance". Là encore, sont ciblés les contrats des mutuelles Maaf, MMA et GMF "faussement présentés aux sociétaires comme étant portés par des structures mutualistes. En réalité, la majeure partie des garanties est portée par des sociétés commerciales", Covéa.

L’association a également saisi le régulateur des assurances, l’Autorité de contrôle prudentiel (ACPR) ainsi que de nombreux régulateurs, notamment américain, qui doivent donner leur feu vert au rachat de Partner Re par Covéa. Car là est la cible réelle de l’ASPM: faire échouer cette opération.

Résurgence de la bataille contre Scor

Chez Covéa, on tombe des nues: être attaqué par une association qui a deux mois d’existence et dont les représentants sont inconnus du monde de l’assurance. Dominique Paillé est ancien député des Deux-Sèvres, ex-conseiller de Nicolas Sarkozy et secrétaire général adjoint de l’UMP (ex-LR).

L’auteur de la plainte de l’ASPM au pénal est Didier Calmels, homme d’affaires dans les années 1990 qui s’est illustré dans la reprise d’entreprises en difficulté à travers son fonds "Développement et Partenariat". Il a notamment repris Le Tanneur, Doux avant d’échouer à redresser les pianos Pleyel. Proche de Bernard Tapie et Jean-Louis Borloo, il a été incarcéré pendant deux ans après avoir assassiné sa femme il y a trente ans.

Une ambiance très lourde qui persuade les dirigeants de Covéa que ces attaques judiciaires sont le signe d’un "règlement de comptes" nous explique un proche du groupe. L’assureur assure que ces plaintes n’ont "pas de fondement juridique" et rappelle que la Commission européenne a autorisé la semaine dernière le rachat de Partner Re.

"Cette nouvelle affaire sent les résurgences de la guerre contre Scor, lâche sans hésiter un proche de Covéa. Son patron voulait à l’origine racheter Partner Re". Denis Kessler et Thierry Derez se sont menés une bataille acharnée pendant trois ans avant de faire la paix l’an passé. La saisie de la DGCCRF cible d’ailleurs la position du patron de Covéa, Thierry Derez, qui "concentre les pouvoirs", et rappelle que le régulateur (ACPR) a demandé "une réforme en profondeur de l’architecture" de Covéa.

Guerre interne ou de mutuelles concurrentes?

Le président de l’ASPM réfute cette thèse: "nos adhérents sont tous des sociétaires de mutuelles et notamment de celles de Covéa, MMA, GMF et Maaf". Dominique Paillé revendique sa qualité de sociétaire de MMA depuis 30 ans, lui qui est né dans les Deux-Sèvres et en a été député.

"Le rachat de Partner Re suscite des jalousies de concurrents", glisse un proche du groupe. Des sociétaires de mutuelles concurrentes, comme de la Macif, sont aussi adhérents de l’association. Elle aussi a pourtant utilisé ses excédents de capital pour racheter Aviva France pour 3,2 milliards d’euros l’an passé.

Cette nouvelle guerre contre Covéa et son patron, Thierry Derez, est-elle cette fois le signe d’une guerre fratricide entre assureurs mutualistes? A Niort, la "capitale" de nombreuses mutuelles comme Macif, Maif ou Matmut, "on n’entend pas de voix s’élever sur ce dossier qui semble être très parisien", explique Jérôme Baloge, le maire de la ville.

"Le fond du dossier n’est pas que commercial, note un banquier qui les fréquente tous depuis vingt ans. Les batailles entre mutualistes mêlent aussi des guerres de réseaux francs-maçons". L’association revendique la défense des "grands principes mutualistes". Son président va même plus loin et assume être un "défenseur philosophique de la mutualité…"

Matthieu Pechberty Journaliste BFM Business