"Mouches soldats noires", complément alimentaire à base d'algues rouges: comment ces entreprises de "l'économie bleue" contribuent à la protection de l'environnement

À deux jours du début du sommet des océans, des associations ont manifesté à Nice. - Valery HACHE / AFP
Investir dans des activités durables peut être rentable. Avant le sommet de l'ONU sur l'océan, Monaco a choisi de mettre en valeur des entrepreneurs engagés avec succès dans l'"économie bleue".
"Nous devons montrer que l'écologie n'est pas sacrificielle. Nous devons montrer que protéger l'océan, protéger l'environnement, ouvre de nouvelles perspectives économiques", explique l'exporateur Bertrand Piccard.
L'explorateur participait au Forum sur l'économie et la finance liées à l'océan, organisé samedi et dimanche dans la Principauté. Sa fondation Solar Impulse a répertorié 1.600 solutions réconciliant économie et écologie.
Cela peut être le cas de carburants durables, de béton écologique favorisant la biodiversité ou encore de la thalassothermie. Cette technologie permet aux zones littorales de climatiser leurs bâtiments en allant chercher le froid au fond de la mer plutôt qu'avec des climatiseurs gourmands en électricité, parfois produite à partir de pétrole, source de réchauffement climatique.
Certaines solutions présentées à Monaco sont plus surprenantes, comme le pari de l'entreprise néerlandaise Protix sur les mouches soldats noires, des insectes capables de transformer les déchets organiques en protéines et lipides. Réduites en poudre, elles sont ensuite utilisées dans l'alimentation animale, en particulier dans l'aquaculture, ce qui permet de diminuer la quantité de poissons utilisés simplement pour nourrir des poissons d'élevage.
Lancée il y a 15 ans, Protix exploite depuis 2019 une grande usine près de La Haye et se prépare à exporter son modèle.
Dans le sens inverse, de la mer à la terre, les Américains de Symbrosia ont développé SeaGraze, un complément alimentaire à base d'algues rouges à destination des ruminants. Une très petite quantité suffit à augmenter de 8% le rendement de l'alimentation tout en réduisant de 80% les émissions de méthane de ces animaux, qui représentent 5% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde.
"Ristourne verte"
Fondée en 2018, l'entreprise compte déjà des partenaires de poids comme le géant agroalimentaire Danone et ses contrats en cours couvrent 700.000 bêtes pour un revenu annuel moyen de 48 millions de dollars dans les cinq ans à venir, explique sa PDG Alexia Akbaye.
Elle aussi lancée en 2018, Matter s'attaque pour sa part aux microplastiques grâce à Regen, une technique de filtration auto-nettoyante capable de capturer 80% de ce poison des mers et des organismes qui y habitent. Elle est applicable pour l'instant à l'industrie textile, aux stations d'épuration et aux lave-linges domestiques.
Pour les usines textiles en particulier, soumises à des régulations coûteuses sur la qualité des eaux qu'elles rejettent, "ce n'est pas un bonus vert, c'est une ristourne verte, parce qu'elles économisent 20% de leur facture d'eau", assure le PDG, Adam Root.
L'entreprise britannique a investi 10 millions de livres depuis sa création et espère atteindre l'équilibre dans les prochaines années, grâce à des partenariats avec Patagonia, Nike ou H&M.
Toujours face au tsunami de plastique, Plastic for Change, basée en Inde, a créé une filière de plastique recyclé validée par des labels de commerce équitable.
D'un côté, ils proposent un cadre sécurisant aux bataillons de chiffonniers et de l'autre, ils fournissent un plastique recyclé de qualité constante aux entreprises intéressées.
Dans le monde, "il y a environ 15 millions de personnes à la base de la base de la chaîne d'approvisionnement, qui collectent les déchets plastiques et sont à l'origine de 58% du plastique engagé dans l'économie circulaire à travers le monde", explique Andrew Almack, PDG de Plastic for Change.
Créée en 2011, l'entreprise a atteint l'équilibre financier en 2023 et voit son chiffre d'affaires tripler chaque année depuis six ans, assure-t-il.
"Mais on n'est encore qu'à la surface, notre objectif est d'intégrer un million de chiffonniers. Ce n'est pas une affaire qui peut rapporter des milliards, c'est une affaire qui peut rapporter des milliers de milliards", lance-t-il.