L'Allemagne réinstaure le contrôle aux frontières: Schengen en péril?

À partir d’aujourd’hui et pendant 6 mois, plus de 3000 km de frontières allemandes feront l’objet de contrôles aléatoires. L’argument des autorités: prévenir le "terrorisme et la criminalité transfrontalière" mais il s’agit surtout de répondre à l’immigration illégale. Selon un récent sondage, l’immigration est actuellement le principal sujet politique pour 48% des Allemands loin devant l’économie et le climat. C’est aussi grand thème de campagne de l'extrême droite qui a réalisé des scores inédits dans deux régions ce mois-ci et qui est en passe de remporter l'élection dans le Brandebourg ce dimanche.
Schengen est-il en péril?
Cette décision allemande fait réagir et inquiètent plusieurs dirigeants européens. Le Premier ministre Polonais, Donald Tusk, la juge " inacceptable ". Pour lui il s’agit d’une "suspension de facto" de l'accord permettant la libre circulation des personnes.
"Je n'ai aucun doute que c'est la politique intérieure allemande qui a conduit à ce durcissement et non notre politique contre la migration illégale à nos frontières", dit-il.
Colère aussi du ministre autrichien de l'Intérieur qui juge, “illégale” le choix des autorités allemandes.
Autre réaction, celle de l'eurodéputée néerlandaise Raquel García Hermida-Van der Walle. "L'une de nos libertés les plus importantes est mise en péril pour envoyer un signal politique" déplore-t-elle.
Bruxelles, pour sa part, s’est contentée d’un commentaire mesuré ne risquant pas de contrarier Berlin. Elle rappelle que les États membres ont le droit de mettre en œuvre ces contrôles pour faire face à une "menace grave" mais que cela doit rester exceptionnel.
Actuellement, plusieurs pays dont la France, l’Italie, le Danemark, l’Autriche, filtrent les entrées sur leurs territoires en invoquant notamment l’immigration clandestine.
L’immigration met à mal la coopération
Depuis 2015 et les vagues de réfugiés venant du Moyen-Orient, d’Afrique et d'Asie, l’accord de Schengen est sous tension. C’est d’ailleurs à partir de ce moment-là que les demandes de dérogation ont explosé.
Plusieurs États membres demandent une révision et un durcissement des règles en matière migratoire. Le Danemark, a lancé un appel pour développer l'externalisation de la politique d'asile, qualifiant d’ "insoutenable" l’augmentation des arrivées irrégulières. Et il est aujourd’hui soutenu par une quinzaine de pays membres.
Dans une lettre adressée à la commission en mai dernier, juste avant les européennes, les signataires préconisent "nouvelles mesures" afin notamment de transférer plus facilement des migrants vers des pays tiers en dehors de l’union.
Ces dernières années, l’UE a conclu des accords avec la Tunisie, la Mauritanie et l’Égypte visant à réduire les flux migratoires… Des accords controversés et qui coutent chers.
Cet été, lors de la présentation de son programme devant le parlement, Ursula von der Leyen s’est engagée à tripler le nombre de garde-côtes et de gardes-frontières de Frontex pour arriver à 30.000. La nouvelle Commission européenne pourrait compter un nouveau commissaire en charge de l’Asile et de la Migration.