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ÉDITO. Trump contre l'Europe: guerre commerciale ou guerre d’influence?

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Vendredi, Donald Trump menace de 50% de droits les importations européennes. Dimanche, il annonce une prolongation de la pause tarifaire jusqu'au 9 juillet. Mais que cherche le président américain?

Il avait baissé d’un ton. Le revoilà plus bruyant que jamais. Donald Trump a sorti une nouvelle fois l’arme des droits de douane, vendredi, menaçant d’imposer des taxes allant jusqu’à 50% sur les importations européennes.

Dimanche, virage à 180 degrés: il annonce, après un appel de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, une prolongation de la "pause tarifaire" jusqu’au 9 juillet. Une volte-face en moins de 48 heures.

Faut-il s’en inquiéter? La réponse est non. Et il serait temps de cesser de s’alarmer à chaque sortie de l’ancien président américain.

Des menaces à répétition, rarement suivies d’effets

Les coups de pression de Donald Trump sont bien connus. Et ils sont, la plupart du temps, sans lendemain. Son entourage, à commencer par le secrétaire au Trésor Scott Bessent, travaille à l’inverse à une zone de libre-échange transatlantique.

De plus, une hausse brutale des droits de douane pénaliserait avant tout… les consommateurs américains. Plus de taxes, ce sont des produits plus chers. Et faut-il rappeler que Donald Trump a aussi été élu dans la foulée d'une crise inflationniste importante.

S’ajoute un constat largement partagé par les économistes: les guerres commerciales freinent la croissance mondiale. Et donc, par ricochet, celle des États-Unis. Inutile donc de s’affoler à chaque tweet ou déclaration. Comme diraient les Britanniques: "keep calm and carry on".

Un conflit plus politique qu’économique

Mais si les menaces ne se traduisent pas forcément en actes, elles ne sont pas sans fondement politique. Trump réagit à l’offensive réglementaire menée par l’Union européenne dans le numérique. En ligne de mire: le Digital Services Act (DSA) et surtout le Digital Markets Act (DMA).

Le premier impose aux grandes plateformes davantage de transparence sur leurs algorithmes et une modération accrue des contenus. Le second, plus offensif, encadre les pratiques des géants du numérique pour garantir une concurrence équitable.

L’Edito de Raphaël Legendre : Ce qui se mijote derrière l'offensive de Trump - 26/05
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Fin avril, la Commission européenne a prononcé ses premières sanctions dans le cadre du DMA: 500 millions d’euros d’amende pour Apple, accusé de clauses abusives dans l’App Store, et 200 millions pour Meta, pour usage illégal de données personnelles.

Pour Washington –et encore plus pour les partisans de Trump–, ces sanctions ciblent délibérément les entreprises américaines. D’où les menaces de représailles commerciales.

Pas une guerre commerciale, mais une guerre d’influence

Alors, s’agit-il d’un nouveau front de la guerre commerciale? Pas vraiment. Le bras de fer est moins économique que géopolitique et idéologique. C’est une guerre d’influence entre deux modèles: celui de l’UE, axé sur la régulation et la protection des citoyens, et celui des États-Unis, plus libéral et favorable aux géants technologiques.

Dans ce contexte, les droits de douane brandis par Trump ne sont qu’un outil parmi d’autres. Un levier politique, pas une politique commerciale structurée.

Pour les Européens, le véritable enjeu n’est donc pas de répondre coup pour coup aux déclarations de Trump. Il est de renforcer notre compétitivité, notre attractivité économique et notre souveraineté, seuls moyens de défendre notre modèle sur la scène mondiale. Le reste, c’est du bruit.

Raphaël Legendre