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Comme Trump aux Etats-Unis, le gouvernement russe, qui voit arriver la récession, s'en prend à sa banque centrale qui ne baisse pas assez vite ses taux

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Alors que la Russie voit son économie ralentir, le gouvernement russe et la banque centrale du pays affichent leurs désaccords sur les moyens à mettre en œuvre.

Le gouvernement russe et la Banque centrale russe (BCR) se sont opposés vendredi au forum économique de Saint-Pétersbourg sur les moyens à mettre en place pour dynamiser l'activité, en plein ralentissement de la croissance après deux années de surchauffe entraînée par les conséquences du conflit en Ukraine.

Si l'économie russe avait fait preuve en 2023 et 2024 d'une résilience inattendue face aux sanctions prises par les Occidentaux depuis 2022 en représailles à l'offensive russe en Ukraine, la conjoncture a changé depuis quelques mois.

Caroline Loyer : Le "Davos russe" dans l'ombre de la récession - 20/06
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Les lourds investissements publics dans le complexe militaro-industriel pour soutenir l'armée russe ne permettent plus de stimuler l'économie. Et pour plusieurs acteurs économiques de poids, la responsable est toute trouvée: la patronne de la Banque centrale, Elvira Nabioullina, qui mène une politique monétaire très stricte, avec un taux directeur très élevé, à 20% (abaissé d'un point début juin), pour lutter à tout prix contre l'inflation. Ce qui n'est pas (ou plus) du goût du patronat et de certains ministres du bloc économique.

"Les indicateurs montrent qu'il est nécessaire de baisser les taux d'intérêt, qu'il faut passer d'un refroidissement contrôlé à un réchauffement de l'économie", a tonné le vice-Premier ministre, Alexandre Novak, en charge au sein du gouvernement de l'important dossier de l'énergie.

"Il est l'heure de baisser" le taux directeur, a appuyé Alexandre Novak , mettant en garde contre le risque de "rater le moment opportun", alors qu'il a qualifié la conjoncture actuelle de "douloureuse".

Une situation qui rappelle évidemment celles des Etats-Unis où le président Donald Trump s'en prend depuis des semaines au président de la Fed qui ne baisse pas les taux d'intérêt.

La croissance a ralenti au premier trimestre à 1,4%, son niveau le plus faible depuis les trois premiers mois de 2023, selon des chiffres officiels, et les perspectives sont moins bonnes que l'an passé.

"Au bord" de la récession

Jeudi, le ministre de l'Économie, Maxime Rechetnikov, avait de son côté averti à Saint-Pétersbourg que l'économie russe était "au bord" de la récession et que sa capacité de rebond dépendait "des décisions" prises par l'Etat russe et la Banque centrale, notamment concernant les taux. Deux jours plus tôt, le conseiller économique de Vladimir Poutine, Maxime Orechkine, avait, quant à lui, estimé que le modèle de croissance russe, mis en place en urgence depuis 2022 pour encaisser le choc des sanctions, était "épuisé" et devait être repensé.

Malgré ces critiques publiques, la Banque centrale semble vouloir maintenir sa politique limitant les crédits, au moment où l'inflation atteint toujours près de 10%. "Une simple baisse rapide du taux directeur ne changera probablement pas grand-chose à court terme, si ce n'est le niveau des prix et leur augmentation", a répondu à Saint-Pétersbourg Andreï Gangan, directeur du département de la politique monétaire de la BCR.

Dans ce contexte de divergences étalées sur la place publique, le président Vladimir Poutine doit s'exprimer vendredi après-midi lors de la session plénière du forum économique.

J. Br. avec AFP