Fraîchement réélu, Laurent Berger essuie un camouflet concernant les retraites

Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, le 29 avril 2021 à Paris - Ludovic MARIN © 2019 AFP
Unique candidat à sa succession, Laurent Berger a été réélu ce jeudi à la tête de la CFDT, le premier syndicat français. Pour autant sa direction a essuyé un camouflet ce jeudi lors du 50e Congrès de l'organisation à propos de la question sensible des retraites en étant contrainte par un vote interne à durcir sa résolution générale.
Les délégués réunis à Lyon ont adopté un amendement affirmant que "l'allongement de l'espérance de vie ne [pouvait] justifier une augmentation de l'âge moyen de liquidation", prenant ainsi le contre-pied de la formulation initiale.
Celle-ci énonçait initialement que "l'allongement de l'espérance de vie [pouvait] justifier une augmentation de l'âge moyen de liquidation".
Adopté largement, à 67,5% des voix exprimées, l'amendement avait été présenté par le Syndicat Interco de la Somme, mais d'autres syndicats avaient présenté des amendements similaires.
"Nous ne souhaitons pas avoir, dans notre future résolution confédérale, une phrase qui affaiblit le sens du reste du texte et qui pourrait même alimenter une réforme injuste, surtout en ce moment", a expliqué à la tribune le représentant du syndicat Arnaud Espel.
"Un allongement suffisant"
La CFDT a pris très clairement position contre le report de l'âge légal de la retraite à 65 ans souhaité par Emmanuel Macron, mais elle défend de longue date le lien entre allongement de l'espérance de vie et augmentation de la durée de cotisation.
Le projet de résolution "ne dit rien de plus... mais aussi rien de moins que ce que dit la CFDT depuis au moins 20 ans, au moins depuis le congrès de Tours" de 2010, avait expliqué mercredi à la tribune le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger.
Arnaud Espel a rappelé que la loi Touraine de 2014 prévoyait déjà un allongement progressif de la durée de cotisation, qui s'élèvera à 43 années en 2034. Il a aussi souligné que "depuis 2020, l'espérance de vie des femmes [avait] reculé de près de trois mois, celle des hommes de cinq mois".
"L'allongement de la durée de cotisation est déjà en cours, il est suffisant.(...) Disons clairement que la CFDT ne peut envisager, accepter et encore moins assumer l'idée d'une nouvelle augmentation de la durée de cotisation et donc de l'âge moyen de départ à la retraite", a-t-il insisté.
"Défiance"
Secrétaire national chargé des retraites, Frédéric Sève a défendu la position de la direction:
"Face à l'allongement de l'espérance de vie, la loi Touraine a programmé un allongement de la durée de cotisation qui a équilibré les comptes et permis de préserver le pouvoir d'achat des actifs comme des retraités. (...) Nous l'acceptons toujours, c'est pour cela que nous le remarquons dans la résolution. Mais nous n'acceptons rien de plus".
Auprès de la presse, Frédéric Sève a reconnu que ce vote montrait une forme de "défiance", vis-à-vis des "interlocuteurs" de la CFDT (l'exécutif), de "l'exécutif confédéral" (la direction de la Confédération), et du "sujet" des retraites.
S'il n'y a "pas d'autres signaux" d'un manque de confiance vis-à-vis de la direction de la CFDT - tous les membres du bureau national qui se représentaient ont été réélus avec plus de 94% des voix -, "je ne mets pas le couvercle sur celui-ci", a-t-il dit.
"La sensibilité au sujet retraite est forte (...) Il y a un côté +n'en jetez plus+", a-t-il observé. En revanche, le débat sur la loi Touraine n'a pas été rouvert, s'est-il félicité.
