Travailleurs des plateformes: la rémunération sera au menu du futur dialogue social

Le thème de la rémunération, souvent qualifié de prioritaire par les travailleurs des plateformes, figurera au menu de ceux qui pourront donner lieu à des accords dans le cadre du futur dialogue social du secteur, précise jeudi une ordonnance publiée au journal officiel.
Des "accords collectifs de secteur peuvent notamment porter sur l'ensemble des conditions de travail, de rémunération et d'exercice de l'activité professionnelle, sur la formation professionnelle et les garanties sociales des travailleurs, ainsi que sur l'établissement et la rupture des relations commerciales avec les plateformes", est-il ainsi écrit.
L'ordonnance, globalement bien accueillie par les acteurs concernés, prévoit également "l'obligation d'engager une négociation" annuelle sur, au choix, "les modalités de détermination des revenus, les conditions d'exercice de l'activité, la prévention des risques professionnels ou la sécurisation des parcours professionnels".
Négociations annuelles obligatoires
Le texte vient également compléter les dispositions existantes, notamment en ce qui concerne la future représentativité des organisations professionnelles, jusque-là inconnue.
Pour être "reconnues représentatives", les plateformes devront ainsi "représenter une audience suffisante". Ce critère sera calculé en considérant le nombre de travailleurs de chaque plateforme, pondéré d'un coefficient de 30%, ainsi que le montant des revenus d'activités générés, pondéré d'un coefficient de 70%.
Les organisations de plateformes, comme l'Association des plateformes d'indépendants (API, qui rassemble notamment Deliveroo ou Uber), pourront déposer leur dossier "jusqu'à fin juin-début juillet", selon l'autorité de régulation des plateformes d'emploi (Arpe), l'instance qui supervisera ensuite le dialogue social du secteur.
Un arrêté fixant la liste des organisations représentatives sera publié avant le 31 octobre 2022.
L'ordonnance définit enfin les conditions à remplir pour valider les accords. A l'instar des autres branches, ceux-ci devront avoir recueilli plus de 30% des suffrages exprimés à condition que 50% d'entre eux ne s'opposent pas au projet.
Ces accords pourront ensuite être "homologués", c'est-à-dire s'appliquer à l'ensemble des acteurs du secteur, si moins de 50% des organisations représentant les plateformes s'y opposent.
Satisfaction de Uber et de Deliveroo
Enfin, l'Arpe pourra, à la manière du fonctionnement des CSE, financer des demandes d'expertises ou intervenir comme médiateur en cas de différend entre des travailleurs et une plateforme.
Pour Uber, "transposer et adapter les règles de ce mécanisme puissant qui a fait ses preuves dans le monde du salariat, permettra de renforcer les protections et indépendance des travailleurs. Nous espérons qu'un premier accord sectoriel sera signé d'ici la fin de l'année".
"Deliveroo salue le choix des pouvoirs publics de créer cette formule innovante de dialogue social destiné spécifiquement aux travailleurs indépendants des plateformes, a apprécié le groupe britannique. Nous prendrons toute notre part à ce dialogue, et sommes mobilisés aux côtés de l'Arpe pour créer les conditions du succès de cette élection."
Les plateformes semblent également apprécier que le texte réaffirme l'indépendance des livreurs, alors que certains syndicats militent toujours pour l'instauration du salariat.
VTC en colère
"Les thèmes qui pourront être abordés sont relativement larges", a indiqué Stéphane Chevet (Union-Indépendant), dont l'organisation est en lice chez les VTC et chez les livreurs. Surtout, le droit d'expertise a été ajouté".
"Par contre, on n'a toujours pas le nombre de représentants qui seront désignés et concrètement, c'est un vrai problème pour nous", déplore-t-il.
Selon l'Arpe, deux décrets seront prochainement pris, avant le scrutin pour les représentants de travailleurs et avant l'été pour ceux des organisations professionnelles.
Parallèlement, les VTC ont encore manifesté fin mars pour demander à bénéficier des mêmes mesures de protection que les taxis dans le contexte de hausse des prix du carburant, tandis que les coursiers réclament eux une réforme de la réglementation pour exercer.