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Pourquoi les contrôleurs de la SNCF menacent de se mettre à nouveau en grève

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Si le syndicat Sud Rail est à la manoeuvre, c'est bien le collectif ASCT qui a été à l'origine de la grande grève hivernale de 2022 qui fait à nouveau pression sur la direction.

Les départs en train pour les vacances de Pâques et les ponts de mai sont-ils menacés? Sud-Rail a déposé un préavis de grève allant du 17 avril au 2 juin, couvrant les vacances scolaires et les jours fériés du mois de mai, mais n'appelle pas à la grève à ce stade, a précisé une source du syndicat à l'AFP et à BFM Business ce mardi.

Sud Rail est le troisième syndicat de la SNCF et le deuxième chez les contrôleurs appelés à la SNCF chefs de bord ou ASCT (Agents du service commercial trains).

À ce stade, il s'agit seulement d'un avertissement adressé à la direction et pas d'un appel à la grève. Si un préavis a bien été formellement déposé pour cette large période, une date précise d'appel à la grève sera communiquée "plus tard", histoire d'attendre le retour de la direction.

Si le syndicat Sud Rail est à la manoeuvre, c'est bien le collectif ASCT, très actif sur les réseaux sociaux, qui a été à l'origine de la grande grève hivernale de 2022, qui fait à nouveau pression sur la direction.

Le préavis a ainsi été déposé par Sud Rail au nom du collectif qui n'est pas reconnu comme partenaire social à la SNCF.

Pas encore un appel à la grève

Dans un communiqué, l'organisation explique: "nous déciderons, dans les jours qui viennent, notre stratégie revendicative en consultant nos équipes militantes et nos instances démocratiques".

Sud Rail dénonce "la mise en place d’un nouveau logiciel informatique, le planning des contrôleurs se trouve modifié sans arrêt, sans avis préalable… Les conditions de travail des contrôleurs et des contrôleuses se dégradent au fil des semaines. Comment accepter de ne pas pouvoir planifier sa vie personnelle au-delà de 48h, qui accepterait de ne pas pouvoir prévoir un rendez-vous du jour au lendemain?".

"A ce stade, aucune réponse satisfaisante de la direction qui cherche la productivité "coûte que coûte". Malgré plusieurs alarmes sociales, aucune avancée n’a pu être constatée. Encore une fois, malgré des propositions et des revendications claires et atteignables, la Direction SNCF fait le choix du conflit et de la stigmatisation des contrôleurs", peut-on lire.

"On est dans la phase de dialogue", a réagi la direction de SNCF Voyageurs à l'AFP. "Il y a un préavis auquel nous sommes, comme tous les préavis, extrêmement attentifs", a ajouté la compagnie. "Il y a (...) déjà eu des préavis ces derniers mois mais qui n'ont pas eu d'impact".

"Evidemment les conditions de travail ne sont pas simples sur ce métier de première ligne", entre un planning de travail typique d'une population roulante, et des relations parfois tendues avec les voyageurs. Mais la direction de SNCF Voyageurs a déjà pris de nombreux engagements de puis les premières mobilisations écloses sur Facebook fin 2022", analyse sur BFMTV, Arnaud Aymé, consultant transports et DG France de Sia.

La direction met en avant les efforts consentis depuis 2022

En effet, la SNCF met régulièrement en avant le dialogue social étroit avec ces cheminots (avec un Jean-Pierre Farandou en première ligne) et surtout les efforts déjà consentis.

Dans un courrier de février 2024, Alain Krakovitch, directeur de TGV/Intercités chez SNCF Voyageurs rappelait d'abord que "tous les engagements pris en décembre 2022 sont tenus", point que les chefs de bord contestent.

Exemple avec la présence de deux contrôleurs par TGV, une revendication forte. "La montée du taux d'équipement est conforme à ce que nous avons convenu", écrit Alain Krakovitch.

Ou encore l'augmentation des rémunérations à travers les primes et/ou indemnités: "ce sont de vraies avancées sociales: le pacte est respecté et des nouvelles mesures sont annoncées", soulignait-il.

Mais au-delà de ces revendications, c'est le manque de considération qui est régulièrement dénoncé haut et fort.

Des salariés indispensables à la circulation des TGV

"La colère monte depuis 2007 en réalité avec la dégradation de nos conditions de travail, la question de l'avancement, la hausse de la pénibilité du travail de contrôleur et toujours plus de responsabilités. En fait, la non reconnaissance des difficultés de notre métier. On considère qu'il y a une vraie maltraitance de la part de la direction et un vrai manque de dialogue social", nous expliquait un des fondateurs du collectif CNA-ASCT qui compte à ce jour 3.900 membres sur Facebook.

Rappelons que si les contrôleurs se mettent effectivement en grève, les vacanciers risquent d'être fortement pénalisés, car les TGV ne peuvent pas circuler sans chef de bord (même s'ils peuvent être remplacés en partie par des cadres de la SNCF formés pour cela).

Lors de leur dernier mouvement fin 2022, environ 200.000 voyageurs avaient été laissés sur le carreau.

"Il n'est pas certain que les circulations de TGV soient perturbées au printemps. D'abord il ne s'agit que d'un préavis et non d'un appel à la grève, ensuite cela dépendra de l'ampleur de l'éventuel mouvement, enfin la SNCF sait remplacer en partie les chefs de bord par d'autres salariés volontaires et formés à la sécurité", juge Arnaud Aymé.

Interrogée mardi sur RTL, la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités Catherine Vautrin a appelé "chacun à ses responsabilités". "Il faut laisser les Français pouvoir vivre leur vie. Je pense que les Français ont aussi besoin de ces moments".

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business