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Malgré ses bons résultats, le patron de KLM risque d'être évincé pour incompatibilité d'humeur

A la tête de KLM depuis octobre 2014, Pieters Elbers a fait de la compagnie néerlandaise la vache à lait du groupe Air France-KLM.

A la tête de KLM depuis octobre 2014, Pieters Elbers a fait de la compagnie néerlandaise la vache à lait du groupe Air France-KLM. - KLM

Ben Smith, le directeur général du groupe Air France-KLM, envisagerait selon La Tribune de se séparer du néerlandais de KLM et ce malgré ses très bons résultats.

Le patron hollandais de la compagnie KLM, va-t-il se mordre les doigts d'avoir refuser une promotion? Donné un temps favori pour prendre les rênes du groupe Air France-KLM, Pieters Elbers aurait refusé le poste. Et c'est finalement le canadien Ben Smith, ex-numéro 2 d'Air Canada, qui a hérité du poste.

Sauf qu'aujourd'hui le torchon brûlerait entre les deux hommes au point que le départ de Pieters Elbers est désormais évoqué. Et le sort du patron de KLM pourrait être scellé d'ici le 20 février, date à laquelle seront présentés les résultats financiers du groupe. Selon La Tribune qui cite des sources proches du dossier, Ben Smith souhaiterait ne pas reconduire le mandat de son lieutenant hollandais qui arrive à échéance en avril. 

Une décision qui, si elle devait se confirmer, ne manquera pas de semer le trouble aux Pays-Bas. D'autant que la façon dont Pieter Elbers a fait redécoller la compagnie soeur d'Air France est salué par le monde du transport aérien. Pieter Elbers qui a pris la direction de KLM fin 2014 a transformé la compagnie hollandais en cash machine. La compagnie qui réalisait 175 millions d'euros de résultat opérationnel pour un chiffre d'affaires de 9,6 milliards fait depuis des étincelles. Elle a multiplié son résultat par plus de quatre (910 millions d'euros en 2017) et assure l'essentiel des bonnes performances du groupe. 

Les gouvernements vont-ils s'en mêler?

Mais entre Ben Smith et Pieter Elbers, l'ambiance est glaciale depuis la prise de fonction du premier. Ils n’ont pas la même vision stratégique. Le canadien veut créer un groupe global quand le néerlandais voudrait préserver une forme d’indépendance pour KLM. Un poste de directeur général adjoint devait être créé pour Pieter Elbers qui se se serait vu confier la responsabilité des alliances, de l'informatique et de la maintenance.

L’affaire était quasi bouclée mais en arrivant, Ben Smith a changé d’avis. Le poste n’a pas été créé. "Ben Smith veut diriger le groupe. Il n'est pas d'accord sur le partage prévu avec Pieter Elbers et sur la place à accorder à ce dernier au sein du groupe. Il ne veut pas être dessaisi des alliances, de l'informatique et de la maintenance du groupe", explique à La Tribune un proche du dossier qui ne préfère pas être cité.

En retour, le néerlandais a fait en sorte que Ben Smith ne puisse siéger au conseil de surveillance de KLM. Pas directement, mais en se faisant appuyer par les syndicats et les représentants du personnel de KLM avec lesquels il entretient de bonnes relations. En octobre 2018, le président du comité d'entreprise de KLM, Jan Willem van Dijk, a publié dans le quotidien De Telegraaf une tribune pour expliquer l’opposition des salariés à offrir un siège à Ben Smith. Sa mission est "de faire en sorte que l'entreprise survive. C'est beaucoup plus important que de siéger au conseil d'administration de KLM", insistait Jan Willem van Dijk.

Selon un administrateur, Ben Smith aurait été "interloqué" par cette opposition massive. Le DG d'Air France KLM compte répliquer en faisant tout son possible pour que Pieter Elbers prenne le large en avril. Y parviendra-t-il? Il en a en tout cas le pouvoir, mais cette éviction pourrait sembler motivée par de la rancœur plus et non par des motivations stratégiques positives pour le groupe Air France-KLM. 

Ce règlement de compte pourrait aussi inciter les gouvernements français et néerlandais à se mêler de l’affaire pour éviter un affrontement au sein du groupe entre les soutiens du canadien et ceux du néerlandais. Les ministres du Transport de deux pays devront-ils intervenir pour imposer une solution qui donnerait raison au deux sans égratigner leur autorité respective?

Frédéric Bianchi et Pascal Samama