"Qui sera le prochain?": les entreprises américaines en état d'alerte après le meurtre de Brian Thompson

Les entreprises américaines sont nerveuses depuis l'assassinat du PDG d'UnitedHealthcare, Brian Thompson, à Midtown Manhattan la semaine dernière. Les conseils d'administration ont réévalué leur budget de sécurité et il est vivement conseillé aux PDG d'effacer leur empreinte numérique.
"Les entreprises américaines sont nerveuses. Les gens sont en état d’alerte maximale, a déclaré Keith Wojcieszek, responsable mondial du renseignement chez Kroll, à CNN. Les entreprises souhaitent améliorer leur sécurité. Le secteur de la santé est désormais la cible, mais qui sera le prochain?".
"Un signal d'alarme énorme"
Dans un rapport, le département de police de New York a qualifié ce meurtre de "destruction symbolique" qui pourrait servir d'exemple. Résultat: la sensibilisation des entreprises aux réflexes de sécurité est en "forte hausse".
Un constat confirmé par le cabinet de sécurité Global Guardian, qui a reçu 70 nouvelles demandes dans les 36 heures suivant la fusillade.
"C'est un signal d'alarme énorme. L'ambiance a radicalement changé en très peu de temps", a partagé Seth Krummrich.
Ce colonel de l'armée américaine à la retraite est aujourd'hui vice-président du cabinet qui s'occupe de protéger les capitaines d'industries, leurs familles et leurs résidences.
Même les plus petites entreprises se préoccupent du sujet, confirme Eduardo Jany, vice-président senior de la sécurité et de la sûreté mondiales chez News Corp.
"La grande leçon que j'ai apprise, c'est que si vous voulez tuer quelqu'un, vous pouvez le tuer. C'est vraiment effrayant mais vrai", a déclaré anonymement un dirigeant d'une grande banque.
"Il semble fou que nous ne comprenions cela que maintenant".
"Ce n’est pas Ted Kaczynski"
D'autant plus que la menace peut venir de n'importe où et de n'importe qui. L'auteur de la fusillade de Brian Thompson, Luigi Mangione, est un jeune homme de 26 ans qui a fait ses études dans un lycée privé de Baltimore mais aussi au au sein de l'université de Pennsylvanie (UPenn), l'un des établissements privés de la prestigieuse Ivy League.
"Ce n’est pas Ted Kaczynski qui vit dans une cabane quelque part. C’est un homme qui a eu une éducation similaire à celle de nombreux dirigeants d’entreprise", a fait valoir Seth Krummrich, faisant référence au tristement célèbre Unabomber. "C’est un nouveau paradigme."
Ce dernier a conseillé aux dirigeants de supprimer leurs traces numériques, notamment toute information sur leur lieu de résidence ou des écoles de leurs enfants. Parmi les mesures de sécurité internes aux entreprises: l'augmentation en effectif du personnel de sécurité dans les bureaux et résidences, le déploiement d'un contrôle renforcé du courrier mais aussi une concentration plus particulière sur les événements publics auxquels les dirigeants participent.
Risque de "copycats"
"Le risque de voir des événements similaires se multiplier augmente considérablement. Pensez à ce qui s’est passé avant et après Columbine pour les fusillades dans les écoles", s'inquiète Seth Krummrich. "Je suis très préoccupé par le précédent que cela créera à l’avenir. C’est ce qui m’empêche de dormir la nuit".
Le risque de voir apparaître des "copycats" est donc élevé, en particulier au vu de la réaction en ligne positive de la part de nombreux Américains qui refusent de condamner ce meurtre. "Il semblerait que des filles soient en train de flatter cet homme. Ce niveau de notoriété risque de déclencher des imitations. Et soyons honnêtes, certains chefs d'entreprise sont vulnérables", a complété Eduardo Jany.
Sur les réseaux sociaux, les internautes critiquent vivement les programmes d'assurance santé américains et leur logique jugée excessivement lucrative. "Cette rhétorique peut signaler une menace accrue à laquelle sont confrontés les dirigeants à court terme, la fusillade elle-même ayant la capacité d'inspirer à la violence une variété d'extrémistes et d'acteurs malveillants motivés par des griefs", indique le rapport du NYPD.
"La sécurité est un coût irrécupérable"
Brian Thompson n'était pas connu du grand public et dirigeait la division d'assurance santé du groupe global UnitedHealth. Cela signifie que le cordon de sécurité doit désormais atteindre les lieutenants, et non plus seulement le PDG. Mais certaines entreprises n'ont pas les moyens de répondre à l'évolution des menaces.
"La sécurité est un coût irrécupérable. Elle ne rapporte pas d’argent aux entreprises, c’est donc un poste facile à réduire au moment de l’élaboration du budget", a expliqué Seth Krummrich. "Vous pouvez prendre le risque et espérer que rien ne se passe. Mais si cela arrive, vous vous retrouverez avec un problème émotionnel, financier et visuel bien plus important pour la marque que si vous aviez investi dans la sécurité dès le départ".