Patrick Drahi joue avec les nerfs des créanciers de SFR

Nouvel accès de fièvre entre Patrick Drahi et ses créanciers. Selon nos informations, leurs discussions sur la restructuration des 20 milliards d’euros de dettes de SFR sont interrompues depuis une dizaine de jours. Les prêteurs sont vent debout contre le propriétaire du deuxième opérateur français.
"Les négociations sont au point mort, explique une source proche du dossier. Les créanciers sont passablement agacés par le nouveau coup de pression de Drahi."
Le milliardaire a logé le plus bel actif de SFR, son réseau de fibre, dans une fiducie -une sorte de trust, comme l’a révélé L’Informé. Il menace ses créanciers, et bientôt futurs actionnaires, de ne plus avoir la main dessus.
"On ne va pas accepter qu’il vide SFR de son plus bel actif et qu’il devienne un MVNO (Opérateur de réseau mobile virtuel, NLDR)!", s'emporte un proche des créanciers.
SFR est pourtant loin d’être un opérateur virtuel puisqu’il détient encore son réseau mobile et ses fréquences. Mais ce nouveau croche-pattes passe mal alors que les négociations avaient bien avancé ces dernières semaines. "Cela fait partie du jeu de la négociation, tempère un autre proche des discussions. Chacun est dans son rôle."
Chaque camp attend désormais les résultats du troisième trimestre de SFR, publiés ce mercredi, pour relancer les pourparlers. Altice, maison-mère de l’opérateur télécom, et ses créanciers n’ont pas souhaité commenter.
Jusqu’à 25% du capital de SFR en jeu
Patrick Drahi en est à son deuxième coup de théâtre en quelques mois. Au printemps, les 3,8 milliards d’euros résultants des ventes de BFM (dont BFM Business), La Poste Mobile et des data centers avaient été, là aussi, exfiltrés de SFR et mis hors de portée des créanciers. Un levier qui avait fonctionné puisque les négociations avaient ensuite avancé.
Le propriétaire d’Altice accepte désormais de livrer 2,6 milliards d’euros pour rembourser en partie ses prêteurs et leur offrir 18% du capital de SFR. En échange, ils effaceront un tiers de leurs créances en finançant à nouveau l’opérateur entre 13,7 et 14,4 milliards d’euros. Le montant précis et surtout le taux d’intérêt de la nouvelle dette restent à négocier.
Patrick Drahi souffle le chaud et le froid. La mise à l’écart du réseau de fibre (XP Fibre) est un nouveau moyen de faire pression. Altice veut obtenir un taux d’intérêt de 6,5%, soit un point de moins que ce que proposent les créanciers. L’enjeu du coût financier est de 150 millions d’euros par an, un montant important alors que les marges de SFR ont reculé de 75 millions d’euros sur le seul deuxième trimestre. En contrepartie, le milliardaire est prêt à lâcher du lest sur la part du capital de SFR.
"Lui leur propose 18%, eux réclament 34%, ils seront quelque part entre les deux, autour de 25%", résume un bon connaisseur du dossier.
Un niveau qui conviendrait bien aux créanciers. Ils veulent une part du capital la plus élevée possible pour profiter des remontées de cash futures et notamment de la vente prochaine du réseau de fibre.