Nicolas Sarkozy s’est opposé à la vente de Paris Match à LVMH

Les deux milliardaires français les plus puissants et un ancien président de la République ont ferraillé autour de la vente de Paris Match. Il y a deux semaines, LVMH est entré en négociations exclusives pour racheter l’hebdomadaire au groupe Lagardère, contrôlé par Vivendi.
Bernard Arnault et Vincent Bolloré ont trouvé un accord après six mois de négociation. Un jeu tactique entre les deux fauves du capitalisme français auquel s’est mêlé Nicolas Sarkozy. Selon plusieurs sources proches du dossier, l’ancien président de la République était contre la vente de Paris Match à LVMH. "Il s’y est même opposé!", confirme une source, rappelant qu’il est administrateur du groupe dirigé par Arnaud Lagardère depuis trois ans. "Il voulait que Paris Match reste chez Lagardère comme il était opposé à la reprise en main de Fayard par Bolloré", précise un autre proche du groupe de média. Contacté, l’entourage de Nicolas Sarkozy ne nous a pas répondu.
Au point que ses relations avec Vincent Bolloré ne semblent pas au beau fixe. "Il y a de l’eau dans le gaz entre Sarkozy et Bolloré" s’amuse un bon connaisseur qui pense qu’Arnaud Lagardère se cachait aussi derrière l’activisme de l’ancien président.
Jeu tactique entre les deux milliardaires
La vente de Paris Match a surpris tout le secteur des médias. "C’est incompréhensible d’avoir vendu Match et Gala", s’étonne un patron de presse. En juin 2023, la commission européenne a autorisé le rachat de Lagardère par Vivendi à condition de revendre l’un des deux titres de la presse people pour éviter une position dominante. Un mois plus tard, Vincent Bolloré a "dealé" avec les Dassault dont il a toujours été proche; les deux familles se fréquentant depuis un siècle. Le Figaro lui a offert un prix inespéré de 50 millions d’euros pour racheter Gala qui réalise 30 millions d’euros de chiffre d’affaires et 6 millions de bénéfices.
A ce moment-là, tout le monde comprend que Vincent Bolloré conservera donc Paris Match et que Bernard Arnault n’aura pas les titres de presse de Lagardère dont il rêvait. Pourtant, les proches des deux milliardaires ne cessent de répéter depuis deux ans qu’ils ont signé un "pacte" en 2021. Le PDG de LVMH acceptant de déverrouiller la commandite du groupe Lagardère, dans laquelle il était allié à Arnaud Lagardère, pour laisser Vivendi en prendre le contrôle. En contrepartie, Vincent Bolloré lui vendait les deux titres phares de Lagardère: Paris Match et le Journal du Dimanche (JDD).
Mais en coulisses, les deux titans "n’ont jamais arrêté de négocier", relate une source proche du dossier.
Le jeu tactique a continué entre les deux hommes qui ont mis six mois à trouver un accord. Après la vente de Gala, Bernard Arnault a envoyé le message qu’il n’aiderait donc pas Vincent Bolloré dans son OPA qui doit, à l’époque, se terminer en novembre 2023. Il refuse de vendre ses 8% de Lagardère à Vivendi. Vivendi se contente de 57% du capital et Arnaud Lagardère gagne aussi du temps en conservant ses 11%. La partie continue.
Paris Match finance Europe 1 et le JDD jusqu'en 2027
Bon joueur, Vincent Bolloré laisse alors la porte entrouverte et prolonge, au dernier moment, le délai de son OPA jusqu’en juin 2025. Le PDG de LVMH comprend que rien n’est fini. Les deux hommes n’ont aucun intérêt au combat mais aiment le jeu. "Bolloré ne veut pas se battre contre l’homme le plus riche de France, assure un de ses proches. Mais Arnault aime bien son profil de raider". Cela rappelle à "BA", comme tout le monde l’appelle, ses offensives sur Boussac, Gucci ou Hermès.
En début d’année, les négociations se poursuivent et les deux milliardaires tombent d’accord sur le rachat de Paris Match pour un prix un peu inférieur à 130 millions d’euros. Une enchère folle que l'opposition de Nicolas Sarkozy semble avoir aidée. Il y a deux ans, Bernard Arnault avait proposé 80 millions d’euros pour Paris Match et Le JDD.
En plus du montant récupéré grâce à Gala, Vincent Bolloré vient de gagner près de 180 millions d’euros sur les deux titres de presse people qu’il avait entre les mains. Incompréhensible? Pas pour le "petit prince du cash". La vente de Gala couvre près de la moitié du prix d’achat de Prisma (120 millions d’euros) par Vivendi en 2021. Celle de Match finance les pertes des médias de Lagardère, Europe1 et le JDD, (26 millions d’euros en 2023) pendant cinq ans, depuis la prise de contrôle par Vincent Bolloré l’an passé jusqu’en 2027.