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"Une efficacité inégale": alors que les aides publiques à l'industrie ont doublé en dix ans, le secteur reste fragile

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Le soutien public à l'industrie a augmenté de plus de moitié, mais le secteur reste fragile, selon la Cour des Comptes.

Les aides publiques de la France à son industrie ont augmenté de plus de moitié ces dernières années, mais la situation du secteur reste fragile, a indiqué jeudi le premier président de la Cour des Comptes, Pierre Moscovici, présentant un rapport sur le sujet à l'Assemblée nationale.

Ce rapport est présenté alors que la France est confrontée depuis des mois à une multiplication des plans sociaux, principalement dans l'industrie (automobile, chimie, sidérurgie, notamment).

"L'efficacité de ces mesures est inégale"

La Cour a enquêté sur "dix ans de politiques publiques en faveur de l'industrie", a indiqué Pierre Moscovici devant la commission des Finances de l'Assemblée, en soulignant que, "malgré la succession de plans et l'augmentation récente des moyens budgétaires alloués au soutien à l'industrie, l'efficacité de ces mesures est inégale".

Selon une évaluation de la Cour à partir des transferts financiers directs ou indirects aux entreprises industrielles, sous forme de prises de participation, de subventions, de prêt ou d'avances remboursables, les soutiens publics au secteur ont atteint "17 milliards d'euros par an de 2012 à 2019 et 26,8 milliards d'euros par an sur la période 2020-2022, hors interventions en fonds propres".

"En excluant les dépenses fiscales et les niches sociales, ce montant s'élève à 5,8 milliards sur 2012-2019 et à 9,6 milliards sur 2020-2022", a précisé Pierre Moscovici.

Parallèlement, sur la période, "après avoir décroché plus fortement que chez nos voisins", le poids économique de l'industrie "s'est stabilisé" à 14% du PIB entre 2011 et 2019, "avant d'atteindre 15% en 2023 en raison du rebond du secteur de l'énergie".

La part de l'industrie manufacturière "reste stable, à 11% de la valeur ajoutée totale de l'économie", une part "nettement inférieure" à celle de l'Allemagne (21%) et de l'Italie (17,5%), a comparé Pierre Moscovici.

En revanche, "la tendance à la baisse de l'emploi industriel s'est inversée (...) sur la période que nous avons étudiée, à partir de fin 2017", a-t-il relevé. "Hormis une diminution ponctuelle en 2020, l'emploi salarié dans l'industrie continue d'augmenter et il a dépassé aujourd'hui le niveau pré-crise sanitaire", a-t-il précisé.

10% de l'emploi en France

La part de l'emploi industriel représente, selon le rapport de la Cour, 10% de l'emploi total de la France. "Cela reste toutefois nettement plus faible que chez nos voisins" italien et allemand, a pointé Pierre Moscovici, ce qui s'explique par la part des industries manufacturières.

Dans son rapport, la Cour recommande, entre autres, de "revoir les modalités de calcul des impôts de production défavorables à l'industrie à condition d'en garantir la neutralité pour les finances publiques".

Parmi les autres recommandations notables, la définition d'un "dispositif durable de soutien au développement des compétences des salariés de l'industrie" et, par souci d'efficacité de la dépense publique, l'ajustement de "l'assiette des dépenses éligibles au crédit d'impôt recherche (CIR)", dispositif de soutien à la recherche et développement R&D), auquel sont très attachés les industriels mais que certains estiment dévoyé car utilisé pour des dépenses ne relevant pas de la R&D.

P. B. avec AFP