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Donald Trump inspire l'UE? Pour "sauver ses aciéries et ses emplois", Bruxelles annonce porter les droits de douane sur l'acier de 25 à 50%

Elections européennes: le drapeau de l'Union européenne, devant le Parlement à Strasbourg

Elections européennes: le drapeau de l'Union européenne, devant le Parlement à Strasbourg - FREDERICK FLORIN / AFP

Bruxelles a également annoncé réduire de moitié les quotas d'acier qui peuvent être importés sans droits de douane.

L'Union européenne passe à l'offensive sur l'acier: la Commission a dévoilé ce mardi des mesures sans précédent, dont le doublement des droits de douane sur les importations, afin de protéger les sidérurgistes face à une concurrence chinoise jugée déloyale et de plus en plus écrasante.

La Commission entend tout d'abord réduire "de moitié" les quotas d'acier étranger qui peuvent être importés chaque année dans l'UE sans droits de douane, a annoncé son vice-président exécutif, Stéphane Séjourné, dans un message sur X.

En outre, les importations dépassant ces quotas vont subir des droits de douane doublés, qui passeront ainsi "de 25% à 50%", a précisé M. Séjourné. Ils grimperont ainsi à des niveaux similaires à ceux mis en place aux Etats-Unis et au Canada, selon les propositions de la Commission, qui devront être validées par les 27 et le Parlement européen.

"Au bord de l'effondrement"

Ce nouveau plan "pour sauver nos aciéries et nos emplois européens", selon Stéphane Séjourné, doit remplacer la "clause de sauvegarde" mise en place en 2019 par l'UE pour aider les producteurs européens, qui expire mi-2026.

"L'industrie sidérurgique européenne était au bord de l'effondrement. Nous la protégerons pour qu'elle puisse investir, décarboner et ainsi redevenir compétitive", avait promis en amont le vice-président de la Commission, qui détaillera mardi ces mesures au Parlement européen, à Strasbourg.

L'UE négocie parallèlement avec Washington une exemption de droits de douane pour l'acier européen. L'objectif étant que l'Europe et les Etats-Unis s'épaulent mutuellement, pour mieux résister face au rouleau compresseur chinois.

Plans sociaux

Les chiffres parlent d'eux-mêmes: l'an dernier, la Chine a fabriqué à elle seule plus de 1.000 millions de tonnes d'acier, soit plus de la moitié de la production mondiale, très loin devant l'Inde (149 millions), le Japon (84 millions) et les États-Unis (79 millions), selon les données de l'organisation professionnelle World Steel.

A côté, les pays européens font pâle figure: l'Allemagne n'a produit que 37 millions de tonnes, l'Espagne 12 et la France moins de 11.

Les industriels européens sont profondément déstabilisés depuis des années par la concurrence des usines chinoises massivement subventionnées. Et ils subissent de plein fouet les surcapacités entretenues par Pékin, qui tirent les prix mondiaux à la baisse.

Couplées à la flambée des prix de l'énergie provoquée par la guerre en Ukraine et à une demande atone en Europe (reflétant les difficultés de secteurs comme l'automobile ou le bâtiment), ces pratiques déloyales selon l'UE ont fait plonger dans le rouge les sidérurgistes européens.

Résultat, ces derniers multiplient les plans sociaux et fermetures de sites, faisant craindre des conséquences en cascade, dans un secteur comptant encore 300.000 emplois directs et 2,5 millions indirects dans l'UE.

En Allemagne, le conglomérat Thyssenkrupp envisage même de vendre sa division acier à l'Indien Jindal Steel, tandis qu'en France, ArcelorMittal vient de supprimer 600 postes et a menacé d'abandonner son projet phare de décarbonation de ses hauts-fourneaux à Dunkerque, faute de mesures de protection adéquates.

Sans attendre leur officialisation, ces mesures ont déjà été accueillies positivement dans les milieux économiques. Le syndicat belge CNE a ainsi salué "le plan ambitieux et nécessaire" de la Commission, tandis que l'action d'ArcelorMittal a grimpé de 9% depuis une semaine.

P.L. avec AFP