"Il y aura beaucoup de dégâts": les droits de douane américains inquiètent les PME françaises exportatrices

La guerre douanière menée par Donald Trump inquiète les entreprises françaises. Selon le gouvernement, environ 28.000 entreprises tricolores seraient touchées par les nouveaux droits de douane américains. Derrière les grands fleurons économiques, un grand nombre de PME exportatrices ont beaucoup à perdre dans la bataille engagée par Donald Trump.
C'est le cas du parfumeur Corania. Laurent Cohen, le patron, présente à BFMTV son parfum à la fève tonka, sa "deuxième meilleure vente sur le marché américain". Ce fabricant d'eau de toilette, qui emploie 70 personnes à Pennes-Mirabeau, dans les Bouches-du-Rhône, voit son activité menacée par l'offensive protectionniste de Donald Trump. "Après la crise du Covid-19, voilà une nouvelle contrainte qui s'abat sur les entrepreneurs français", regrette Laurent Cohen, évoquant des "jours compliqués" à venir. Présente à l'export dans une soixantaine de pays, Corania réalise chaque année plus de 20% de son chiffre d'affaires aux États-Unis, son principal marché.
"On va forcément rogner un peu sur nos marges au début, augmenter également un peu nos prix", avance Laurent Cohen.
"Ça nous est tombé dessus du jour au lendemain" alors que l'entreprise avait déjà conclu les négociations avec tous ses distributeurs pour l'année 2025. "Là, il faut tout revoir", explique-t-il. La compétitivité du parfumeur est aussi mise à mal, car ses principaux concurrents sont basés en Turquie et dans le golfe Persique, où Donald Trump s'est montré plus clément en matière de droits de douane. "On se pose des questions" mais "on a toujours su rebondir", note toutefois avec optimisme sa directrice des opérations, Ophélie Barbeau, se disant "confiante" dans l'avenir de l'entreprise.
"C'est très inconfortable"
Dans les Deux-Sèvres, les droits de douane additionnels mis en œuvre par l'administration Trump compliquent le projet américain de La Fabrique Cookies. Le fabricant de gâteaux et de biscuits a récemment conclu un contrat avec un acheteur américain pour distribuer ses galettes beurrées dans des supermarchés locaux. "En janvier, on a reçu onze containers à produire", explique Élodie Blaizeau, responsable du site d'Ardin, où l'on retrouve une vingtaine de salariés. Ils représentent une tonne de biscuits supplémentaires à produire en trois mois. Une équipe de nuit a été mise en place pour faire fonctionner la ligne de production 24 heures sur 24 et 5 jours sur 7.
Grâce à ce contrat, les Américains sont devenus le premier client de l'usine poitevine, à hauteur de 17% du chiffre d'affaires. Pour l'heure, sept containers sont déjà en cours de livraison. Mais les prochains containers seront lourdement frappés par les nouveaux droits de douane à l'entrée des États-Unis. "Le risque final est que ce soit tellement cher que les ménages américains ne les achètent pas et, dans ce cas, on pourrait se faire déréférencer et on perdrait le contrat", s'interroge sur BFMTV Alexis de Galembert, fondateur de La Fabrique Cookies.
Donald Trump "apporte une énorme instabilité au marché" et "même du haut de ma petite PME c'est très inconfortable", estime Alexis de Galembert
Des promotions mais "pas pendant longtemps"
Spécialiste de l'exportation de produits laitiers, Interval ne cache pas son inquiétude. Basée à Trappes dans les Yvelines, l'entreprise exporte les fromages d'une douzaine de laiteries en France et 60% de ces exportations partent vers les États-Unis. "Les annonces de la semaine dernière ont été particulièrement brutales", déplore son directeur associé, Nicolas Lecuque, sur BFMTV.
À court terme, l'entreprise va "accompagner" ses clients "avec un petit peu de promotions" pour "éviter des décisions drastiques et impulsives", précise-t-il.
Mais "on ne pourra pas financer ça pendant très longtemps", note Nicolas Lecuque, d'autant plus que "les clients qui passent commande ne savent pas si leurs clients à eux accepteront 20% de droits de douane supplémentaires". "On exporte vers les États-Unis depuis plus de 40 ans, mais là c'est une crise comme on n'a vraiment jamais eue", selon le dirigeant, qui considère "très difficile" d'estimer les pertes en termes de volumes et de chiffre d'affaires. Mais "c'est une certitude qu'il y aura beaucoup de dégâts."